Historique du Kommando de Hertine (Rtyne)

Le Kommando extérieur de Hertine dépendant de Flossenbürg se trouve à environ 6 km au Sud-Est de Teplitz (Teplice) dans le village de Welboth (Velvety), appartenant à la circonscription d’Hertine en Bohême du Nord. Le 10 octobre 1944 un transport de 599 Juives Hongroises arrive du camp de concentration d’Auschwitz dans le camp nouvellement érigé de Hertine (1). Les détenues étaient destinées au travail forcé dans l’usine « Fabrique pour la mise en valeur de produits chimiques GmbH » à Welboth, une filiale du Konzern d’explosifs « Dynamit Nobel AG ».

D’après le témoignage d’un ancien détenu, le camp situé dans un morceau de forêt à proximité de l’usine, se composait de 5 baraques dans lesquelles environ 120 femmes dormaient sur des châlits de bois à trois niveaux. Chaque baraque était divisée en pièces séparées, contenant chacune entre 15 et 20 détenues. L’emplacement du camp était  entouré de fil de fer barbelé, et un mirador se trouvait à chacun des quatre coins du camp.(2)

Le chef du Kommando de Hertine était le SS Oberscharfüher Eberhard Walter Behr. Les équipes de gardiens SS se composaient en tout de 41 hommes, qui étaient logés en dehors du camp. Comme dans tous les camps de femmes, il y avait aussi à Hertine des gardiennes. Au nombre de 19, elles habitaient toutes dans la proximité de la ville voisine de Teplitz.

Entre janvier et mars 1945 l’effectif du Kommando était de 550 à 600 femmes. Le 6 janvier 1945, 27 femmes furent transférées du Kommando de Oederan dépendant aussi de Flossenbürg, et situé en Saxe, à Hertine, en même temps que 27 femmes étaient transférées de Hertine à Oederan. D’après le témoignage d’une détenue, ce transport consistait à échanger des détenues âgées contre de plus jeunes; étaient transférées à Hertine celles qui à Oederan fabriquaient des étuis de munition remplis de poudre, et ce travail n’était autorisé que pour les jeunes femmes d’au moins 18 ans.(3) Les inscriptions sur les registres matriculaires confirment ce témoignage ; les femmes transférées d’Oederan à Hertine  étaient nées en 1927 ou 1928 et celles partant pour Oederan étaient nées entre 1907 et 1922. Malgré tout, il restait à Hertine beaucoup de très jeunes femmes.

Un petit Kommando travaillant dans l’agriculture a été créé. La majorité des détenues devait cependant travailler en 3 vacations dans l’usine de munitions toute proche, et remplir bombes et grenades, de phosphore et de poudre.

Les mauvais traitements étaient à l’ordre du jour. Les détenues devaient enlever leurs chauds vêtements d’hiver ; en hiver elles devaient travailler dans l’usine en vêtements de travail légers, ce qui faisait que beaucoup tombaient malades. D’après des témoignages, une jeune fille a perdu la raison à cause des mauvais traitements et elle a été fusillée. À cause d’une explosion dans la fabrique de munitions mi-décembre 1944, une surveillante et toute une rangée de détenues ont été tuées. Comme les SS soupçonnaient un sabotage, d’autres détenues ont aussi été fusillées.(4)

À propos du nombre de morts au Kommando de Hertine, on ne dispose d’aucun chiffre. Dans les registres matriculaires de Flossenbürg il y a dans la période de fin novembre 1944 à fin janvier 1945 quatre cas de décès signalés et le transfert de deux femmes vers Ravensbrück le 16 janvier 1945. Cinq noms de femmes sont rayés et remplacés par d’autres ; à ce propos il s’agit bien d’une correction d’erreurs d’inscriptions.(5) La dernière situation d’effectifs conservée, celle du 13 avril 1945, indique seulement 394 détenues. Il n’y a pas d’explication plausible quant à la grande différence entre les situations de décès documentées et la faiblesse de l’effectif ci-dessus. Les corps des détenues décédées étaient vraisemblablement transportés puis incinérés au crématorium tout proche de Leitmeritz. Le 16 avril 1945 on a enterré 16 détenues Juives dans le cimetière de Hertine.(6)

Le camp a été évacué vers Theresienstadt mi-avril 1945. Les détenus ont effectués la plus grande partie du chemin par chemin de fer et ont été libérés par l’Armée Rouge le 8 mai 1945 à Theresienstadt.

D’après le témoignage d’un détenu, après l’évacuation du camp de Hertine, des femmes du Kommando extérieur de Chemnitz, dépendant de Flossenbürg, déjà évacué vers Leitmeritz, ont été installées dans l’usine de munitions de Hertine jusqu’à sa libération le 8 mai 1945.(7)

Les investigations de la Cour de Justice centrale de Ludwigsburg se sont tournées vers le SS Oberscharführer Eberhard Behr, qui d’après les indications d’un ancien détenu a été fusillé à la fin de la guerre. Les enquêtes se sont arrêtées en 1976.

Alfons Adam

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Notes (Anmerkungen)

  1. Barch Berlin NS 4/FL.393, Bd.2.
  2. Aussage Kornelia f.,1/3/1974, in Barch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 721/73.
  3. Michael Düsing (Hrsg.), Wir waren zum Tode bestimmt. Lodz-Theresienstadt-Auschwitz-Freiberg-Oederan-Mauthausen, Leipzig 2002, S.106.
  4. B.Arch Ludwigsburg, ZStL4 410 AR 721/73.
  5. NARA, RG  338, 290/13/22/3, 000-50-46, Box 537 (Mikrofilm-Kopie in : AGFl).
  6. Schreiben des Bügermeisteramtes von Hertine, 15/4/1945, über die Beerdigung von 16 jüdischen Häftlingen auf dem Ortsfriedhof, in : Narodni archiv (NA), Prag, Okupacni vezenske spisy (OVS), Inv.c.83, Karton 162.
  7. Aussage Kazimiera G., 13/2/1970, in : BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 721/73 ;vgl. auch die Ermittlungen zu Chemnitz (ebenda, ZStL IV 410 AR-Z 203/73) sowie Hans Brenner, Frauen in den Aussenlagern von Flossenbürg und Gross-Rosen in Böhmen und Mähren, in : Theresienstädter Studien und Dokumente 1999, S.269.
  8. Aussage Sarlota B., 21/5/1968, in : BArch Ludwigsburg, ZStL 410 AR 721/73.

Bibliographie (Literatur)

            Michael Düsing (Hrsg., Wir waren zum Tode bestimmt, Lodz-Theresienstadt-Auschwitz-Freiberg-Oederan-Mauthausen, Leipzig 2002.

            Hans Brenner, Frauen in den Aussenlagern von Flossenbürg und Gross-Rosen in Böhmen und Mähren, in : Theresienstädter Studien und Dokumente 1999, S.263-295.

            Jörg Skriebeleit, Die Aussenlager des KZ Flossenbürg in Böhmen, in : Dachauer Hefte 15 (1999), S.196-217.

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.143, 144, 145. Traduit de l’allemand par Jacques Péquériau le 13 mai 2021.

Historique du Kommando de REGENSBURG (Ratisbonne)  –  K 31

Avec un convoi de 400 détenus tous masculins, le dernier camp extérieur du camp de concentration de Flossenbürg (exception faite de quelques ajouts postérieurs de détenus envoyés dans d’autres lieux) fut ouvert le 19 mars 1945 à Regensburg. L’auberge Colosseum dans le quartier Stadtamhof juste derrière le pont de pierres, servait à loger les détenus. De là, ils étaient conduits chaque jour sous bonne garde à des voies ferrées, pour réparer les dégâts des attaques aériennes. Un tiers des détenus étaient des juifs (128) dont 67 Polonais et 42 Hongrois. 84 Polonais non-juifs, 63 Russes, 62 Belges, 25 Français et 22 Allemands faisaient partie, à côté des ressortissants de dix autres nations, des détenus contraints au travail obligatoire à Regensburg. La plupart avait déjà fait tout un périple à travers plusieurs camps ; à peu près la moitié d’entre eux était arrivée à Flossenbürg le 13 février 1945, par les marches d’évacuation des camps extérieurs du camp de concentration de Gross – Rosen.

Beaucoup avaient été envoyés dans le camp de concentration de Flossenbürg comme « travailleurs civils » juste avant le transfert des services de la gestapo de Chemnitz, Nürnberg-Fürth et Regensburg. Le détenu polonais Wladyslaw B. par exemple, avait dû, après l’attaque allemande sur la Pologne, travailler d’abord chez des paysans à Weiden/Oberpfalz, puis dans une scierie à Pressath ; à l’automne 1944, il fut envoyé par la gestapo au camp de concentration de Flossenbürg et, après sa tentative de fuite, transféré au camp extérieur de Regensburg1. Quelques détenus avaient auparavant été envoyés par le train à Dresden. Cette usine avait été détruite lors des attaques aériennes des 13 et 14 février sur Dresden, les détenus furent transférés à Flossenbürg et de là à Regensburg peu de temps après.

Les détenus étaient logés au premier étage de l’auberge dans la salle de bal, les gardiens au rez de chaussée dans la salle de restaurant, les propriétaires de l’établissement habitaient là aussi2. L’hébergement était plus que succinct, les détenus dormaient sur de la fibre de bois, les conditions d’hygiène étaient désastreuses, les détenus ne disposaient que d’une toilette et d’un robinet3. Ceci, ajouté à l’étroitesse des lieux et le fait que la plupart des détenus étaient déjà arrivés très affaiblis à Regensburg, favorisa la propagation de maladies comme le typhus. L’alimentation insuffisante se composait le matin et le soir de pain, le midi il y avait une soupe. Il n’y avait pas d’infirmerie, les malades et ceux qui n’étaient pas capables de travailler restaient couchés dans la salle de bal.

Les détenus étaient occupés douze heures par jour à déblayer les dégâts des bombardements. Ce faisant ils étaient exposés à d’autres attaques aériennes, auxquelles succombèrent plusieurs prisonniers ; d’après les dires d’un survivant, des détenus moururent en essayant vainement de désamorcer des obus non éclatés4. D’autre part il était possible de chercher de la nourriture dans les wagons abandonnés. Pendant qu’ils travaillaient, les détenus étaient soi-disant surveillés par des employés des chemins de fer. Il est évident que plus de trois détenus, comme il est mentionné dans le registre des matricules de Flossenbürg, tentèrent de fuir; la plupart des fugitifs furent vite repris et durent subir de lourdes bastonnades6.

Le chef de kommando SS- Obersturmführer Plagge était d’après Tadeusz Sobolewicz un alcoolique brutal, qui frappait souvent les détenus et les contraignait à aller chercher de l’alcool – même pendant les attaques aériennes. Son adjoint, SS-Obersturmführer Liedtke, arriva à Regensburg comme membre de la Wehrmacht invalide de guerre et fut en charge de

La répartition des gardes, de la déclaration des décès auprès du bureau de l’état civil et du personnel de cuisine. Il était toute la journée dans les locaux d’hébergement et frappait souvent les détenus sans raison valable.

Fin mars 1945, 50 gardiens SS surveillaient 399 détenus à Regensburg7. Les surveillants étaient regroupés de façon très disparate. A côté de gardiens allemands et « allemands par le peuple » comme des yougoslaves, qui avaient plusieurs années d’expérience, il y avait sans aucun doute à Regensburg de nombreux hommes des troupes de construction ou des unités OT, condamnés au service de garde pour divers délits. Le grand nombre de gardiens pourrait s’expliquer par le fait que les détenus travaillaient sur différentes installations ferroviaires et zones attenantes.

A la mi-avril, 17 détenus furent renvoyés à Flossenbürg et remplacés par d’autres. Le dernier rapport de forces du 13 avril 1945 fait état de 374 prisonniers dans le camp extérieur de Regensburg. Dans la nuit du 23 avril, le camp extérieur fut évacué dans la panique. 28 hommes gravement malades et un mort restèrent à Regensburg ; après l’intervention de quelques ecclésiastiques, les malades furent conduits au séminaire ; six d’entre eux seraient morts8.

Le nombre total de détenus décédés à Regensburg est imprécis. Dans les livres de matricules de Flossenbürg seuls 18 décès sont mentionnés, le premier le 5 mars, neuf autres jusqu’au 13 avril, puis plus rien d’inscrit. Cependant le bureau de l’état civil de Regensburg I attestait entre le 23 mars et le 10 avril à lui seul de 35 décès. Sur une liste municipale de personnes décédées sont certes inscrits au total les noms de 44 morts, et même un inconnu est mentionné, qui furent inhumés dans une fosse commune au cimetière central de Regensburg9. D’après cette liste le premier détenu mourut quatre jours seulement après l’ouverture du camp extérieur. On ne put vérifier les quelques témoignages, d’après lesquels, lors de l’évacuation du camp extérieur, les SS auraient jeté des grenades dans l’auberge, tuant de cette façon ou d’une autre entre 100 et 150 détenus. Néanmoins, en un peu plus d’un mois, environ dix pour cent des prisonniers moururent à Regensburg.

Les détenus capables de marcher durent se regrouper devant le Colosseum et en deux colonnes avancer vers l’ouest. Un lieu du nom de Berg semble avoir été le but pour l’une des colonnes, et pour l’autre Laufen/Leobendorf. Des détenus racontent qu’ils traversèrent Landshut et Freilassing avant d’arriver à Laufen le 3 mai10. Quelques-uns réussirent à fuir dans la région de Burghausen. Les SS abattaient les détenus épuisés11.

Après la guerre l’auberge Colosseum servit de dancing, de salle de concerts de rock, de bar de strip-tease et jusqu’à récemment de lieu de représentation de théâtre rural. A l’été 2005 l’auberge fut fermée et transformée en habitation. C’est à une initiative privée que l’on doit la pose d’une stèle commémorative devant le Colosseum.

Les recherches du bureau central de l’administration judiciaire de la région furent poursuivies par le ministère public de München I, mais elles furent interrompues à la fin des années 70.

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1 Aussage Wladyslaw B.,18.9.1975, in : BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR-Z 54/76.

2 Aussagen Agnes D. und Sophie Sch., 25.9.1945, in: ebenda.

3 Ausage Wilhelm J., 17.3.1969, in: ebenda.

4 Tadeusz Sobolewicz,  Aus dem Jenseits zurück,Oswiecim 1993, S.263. Sobolewiczs Angabe von 20 Toten ist mit der Liste der in Regensburg bestatteten Häftlinge (s.u.) nicht in Einklang zu bringen.

5 NARA, RG 338, 290/13/22/3, 000-50-46, Box 537 ( Mikrofilm-Kopie in: AGFI).

6 Aussage Abraham R., 24.9.1969, in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR-Z 54/76.

7 Stärkemeldung der Wachmannschaften und Häftlinge der Arbeitslager im Dienstbereich des HSSPF des Oberabscnitts MAIN nach dem Stand vom 28.2.1945 und 31.3.1945, Bl.72 und 85, in: ITS Arolsen, Historisches Archiv, Flossenbürg-Sammelakt 10.

8 Aussage Tadeusz W., 25.9.1945 in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR-Z 54/76.

9 Die Liste ist abgedruckt in einer Dokumentation über “ Die Aussenkommandos des KZ Flossenbürg in und um Regensburg und ihre Bedeutung für Dtadt und Bewohner” der Klasse II a der Städtischen Berufsfachschule Regensburg, 1983, in: AGFI.

10 Aussage Heinrich O., 16.12.1976, in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR-Z 54/76.

11 Aussage Peter L., 21.12.1976, in: ebenda.

Literatur

Tadeusz Sobolewicz, Aus dem Jenseits zurück, Oswiecim 1993

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p. 237 à 240.

Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 14/02/2013.

Historique du Kommando de AUE

Le 9 novembre 1944 a été enregistré à Flossenbürg un transport d’environ 2400 Juifs Hongrois. La plupart d’entre eux venaient de la ville yougoslave de Bor (environ 150 km de Belgrade), où sous la surveillance de militaires hongrois, ils avaient été astreints au travail forcé dans les mines de cuivre-moitié travail de construction dans les mines ou pour une ligne de chemin de fer-moitié exploitation du cuivre. Après la fermeture du camp en septembre 1944, une grande partie d’entre eux parmi les 5000 parmi les travailleurs forcés qui se trouvaient là, furent fusillés à Covenka, les autres étant par bateau ou à pied transportés vers des camps de concentration allemands, Flossenbürg entre autres. La majorité d’entre eux furent peu de temps après, transférés dans des grands Kommandos de Flossenbürg, ou vers les camps de Buchenwald et Mittelbau-Dora.

Dans cette continuité, est très atypique le transfèrement de 20 détenus (parmi lesquels 1 installateur, 2 maçons, 1 électricien, 1 menuisier et 1 couvreur) de ce transport, vers le centre de construction du Reich Elbe IV, le 24 novembre 1944. D’après les déclarations d’anciens détenus du grand camp de Flossenbürg, un Kommando de volontaires fut constitué pour devenir le Kommando extérieur de Aue, petite ville industrielle de Saxe occidentale dans les Monts Métallifères. Le but de ce Kommando était d’après un écrit de l’OT Einsatzgruppe Kyffhäuser, la construction dans un endroit tranquille d’un foyer pour les Jeunes Hitlériens (Hitler Jugend), aux fins d’école de dirigeants SS. Ainsi, toujours d’après l’OT Kyffhäuser, était assuré l’engagement par les forces militaires SS, de détenus pour du travail de construction gratuit.

Les 20 travailleurs furent transférés à Aue par train, et enfermés dans la prison locale. À côté de la construction du foyer pour les Jeunes Hitlériens, ils devaient fendre du bois et creuser des tombes. Les détenus dépendaient de prisonniers militaires italiens, qui avaient aussi été transférés à cet endroit. D’après des déclarations concordantes, les Jeunes Hitlériens du camp de formation de Aue, tourmentaient les détenus à coup de matraques ou autres actes de violence.

Toutefois, par comparaison avec Bor et Flossenbürg, les conditions de vie étaient supportables-pour le Noël 1944, les détenus purent avoir un poste de radio. D’autres témoins disent qu’ils ont été battus, mais sans conséquences sérieuses. Aux côtés du chef du Kommando, le SS Sturmbannführer Kraus, 3 SS assuraient la surveillance. Il n’y a pas eu de mort de détenus à Aue. Du début à la fin, le Kommando conserva un effectif constant. La preuve en est apportée par la documentation de la Reichhausbildungslager Elbe II, qui pour décembre 1944 fixe l’effectif journalier de 17 à 20 travailleurs (en permanence 16 ouvriers), une situation d’effectifs pour la période du 28 février au 31 mars 1945, avec à chaque fois 20 Juifs Hongrois. Cette situation d’effectifs résulte aussi des chiffres de la «liste des Kommandos extérieurs», qui après la guerre, ont été basés sur le fondement de la Direction du Travail du 13 avril 1945.

Le Kommando extérieur a été dissous fin avril 1945, quand les détenus en même temps que leurs gardiens ont été transportés en camion en direction de Karlstad. A Karlsbad, d’après les déclarations de plusieurs témoins, les gardiens ont abandonné les détenus à la descente du camion. Les détenus furent intégrés à une marche de la Mort en provenance de Mauthausen, et formèrent avec celle-ci, le « Friedshof Kommando », qui du compter chaque fois de 50 à 60 morts. La marche de la Mort rejoignit Theresienstadt, où les détenus du Kommando d’Aue furent libérés le 5 mai 1945.

Le bureau central de l’administration juridique régionale de Ludwigsburg, s’occupa aussi du Kommando d’Aue, dans le cadre de ses médiocres enquêtes de routine.

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Remarques  (Anmerkungen):

1-    Häftlingsnummerbücher des KZ Flossenbürg, NARA, RG 338 290/13/22/3,000-50-46, Box 537 (Kopie in AGFI).

2-    Randolph I.Braham, The politics of genocide.The Holocaust in Hungary, Detroit 2000, S.47f.

3-    Vgl.Liste « 20 Überstellungen nach dem Arbeitskommando Elbe IV Aue/Sachsen »,20.11.1944, in : CEGESOMA, Mikrofilm 14368. Bei den 20 entsprechenden Eintragungen in den Flossenbürger Nummernbüchern wurde unter der Rubrik »Letzter Verbleib » vermerkt : «20.11.1944 Elbe IV Aue/ Sa.»

4-    Brief an Bauleitung Dresden der Waffen-SS und Polizei, 15.12.1944 in : Archiv des Landkreises Aue/Schwarzenberg.

5-    Aussage Moshe F.9.7.1967, in : B.Arch.Ludwigsburg ZStL.IV 410 AR 3019/66.

6-    Aussage Hermann W., 11.3.1969 in : ebenda.

7-    BArch Berlin, NS 4 Fl, 393, Bd.2.

8-    Ebenda, Bestand ehem.ZStA Dok/K 183/11.

9-    Ebenda, NS 4 Fl 399.

10-  BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3019/66

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.72, 73, 74.

Traduit de l’allemand par Jacques Péquériau le 18 décembre 2020.

Historique du Kommando de Oederan

À Oederan, en Saxe, camp extérieur du camp de concentration de Flossenbürg, 500 femmes juives durent à partir d’octobre 1944, fabriquer du matériel pour les machines de refroidissement et machines électriques allemandes GmbH (DKK), une filiale de Auto-Union. La DKK produisait dans différents lieux du sud de la Saxe des projectiles antiaériens de 2 cm entre autres, c’est pour cette raison qu’elle fit venir des détenus à côté d’Oederan mais aussi à Wilischthal. Pour la fabrication à Oederan, on loua les locaux de la filature «Zwirnerei und Nähfadenfabrik Erwin Kabis» qui dut dégager la zone et suspendre sa production. Comme, après la guerre, l’entreprise Kabis adressa une plainte détaillée au département en charge de la justice en Saxe, les «magnats mégalomanes de l’armement» réagirent violemment. Des prisonniers de guerre italiens auraient démonté en un temps record l’ensemble des machines de façon inappropriée, tous les stocks auraient été vendus, mais plus tard seule une petite partie de l’entreprise aurait été utilisée par la DKK (1).

Dans une lettre du 24 juin 1944 au directeur du département de la main d’œuvre au WVHA, SS-Standartenführer Maurer, l’usine de Oederan demandait 500 «déportées de camp de concentration» et priait qu’une date soit fixée pour une inspection avec un représentant du WVHA (2).

Lors d’un rendez-vous à Flossenbürg, apparemment couronné de succès, avec le commandant Koegel («il y eut un très bon contact») la surveillance des détenues fut confiée à des employées de l’usine, qui devaient être formées à partir de mi-août aux frais de la DKK. Les onze premières surveillantes devaient l’être à Ravensbrück, et toutes les autres à Holleischen. Les déportées devaient être remises en trois fois à la DKK (100 le 4 septembre, 200 le 15 octobre et 200 le 1er décembre) ; on se mit d’accord sur l’hébergement des déportées et des surveillantes, tout comme sur la sécurité des locaux. Les déportées qui travaillaient à la fabrication devaient être mises à l’abri dans les sous-sols lors des attaques aériennes (3).

L’envoi en plusieurs fois des déportées conclu entre la DKK et la Kommandantur connut visiblement un léger retard. Des convois arrivèrent d’Auschwitz à Oederan les 13 septembre, 9 octobre et 30 octobre. D’après les documents de la Kommandantur de Flossenbürg concernant l’envoi des déportées à la DKK, 70 femmes environ furent contraintes de travailler à partir du 26 septembre 1944, en octobre 90 de plus, à partir de la moitié du mois encore 130 à 150 femmes. À partir de la mi-novembre de 220 à 240 femmes  travaillaient, puis à partir de décembre jusqu’à 490 (le nombre baissa d’environ 5% au cours du mois) (4).De plus toutes les déportées envoyées à Oederan ne furent pas employées au travail forcé, ce qui montre bien le mauvais état de santé de ces femmes. Ceci est prouvé par bon nombre de témoignages d’après lesquels beaucoup de femmes devaient d’abord être mises en quarantaine et ne pas travailler. Le nombre total de femmes à Oederan s’éleva à 500 ; le 9 octobre 1944, 200 femmes arrivèrent du camp de concentration d’Auschwitz à Oederan. Ces Juives polonaises avaient d’abord été enfermées dans le ghetto de Lodz ; la plupart d’entre elles étaient originaires de Lodz. Sur la totalité des 300 déportées juives qui arrivèrent d’Auschwitz les 13 septembre et 30 octobre, la moitié environ était originaire de Theresienstadt à Auschwitz. Un cinquième des femmes arrivait de Hongrie, il y avait aussi des Polonaises, des Néerlandaises, des Allemandes, ainsi qu’une Russe et une Slovaque dans ces convois (5). En outre, fin novembre, arriva une déportée allemande, présentée comme «asociale» en provenance de Neurohlau, employée sans doute au fonctionnement du camp. Le 6 janvier 1945, 27 femmes furent transférées de Oederan vers Hertine. D’après le témoignage de Sara Honigman, qui était détenue à Oederan, des déportées plus jeunes de Hertine furent échangées dans ce convoi contre des déportées un peu plus âgées de Oederan ;  à Hertine, les douilles des projectiles fabriquées à Oederan étaient remplies de munition et ce travail ne devait être réalisé que par des femmes de plus de 18 ans (6). Les enregistrements dans les livres de matricules confirment ce témoignage : Les femmes transférées de Hertine à Oederan étaient pour la plupart nées en 1927 et 1928, les femmes échangées étaient nées de 1907 à 1922.

D’après des témoignages, les femmes étaient logées dans un grand, bâtiment en pierre de deux ou trois étages, dans lequel des prisonniers de guerre italiens étaient auparavant installés. À droite du réfectoire, se trouvait la cuisine ; il y avait, à chaque étage, quelques dortoirs ; dans chacun, de 30 à 40 femmes environ dormaient sur des bat-flancs de plusieurs niveaux.

Le logement est unanimement décrit comme propre et surtout meilleur qu’à Auschwitz, la nourriture, en revanche, était vraiment insuffisante. Il y avait une sorte d’infirmerie ; quelques femmes parlent de deux femmes déportées médecins. Les lieux étaient bien sûr entourés ; quatre à cinq SS gardaient les déportées.

Les femmes devaient travailler à l’usine, située à environ 15 minutes, en deux équipes de 12 heures chacune ; par exemple il leur fallait percer des trous dans des balles ; elles travaillaient debout et devaient se battre fréquemment avec des machines défectueuses. L’un au moins des contremaîtres allemands est décrit comme un ignoble antisémite(7). Sur les huit à dix surveillantes, l’une arriva par un convoi parti d’Auschwitz pour Oederan. Celles dont on connaît les noms, dont Dora lange, arrivèrent le 10 septembre 1944 de Holleischen, où elles avaient vraisemblablement effectué le stage de formation obligatoire. Leurs lieux de naissance dans les environs de Oederan laissent penser qu’elles avaient travaillé avant dans l’entreprise textile Kabis (8). Plusieurs femmes font état de sévices de la part des gardiennes, alors que d’autres témoins parlent de surveillance humaine. La surveillante en chef fut suspendue pour des raisons inconnues et à partir de janvier 1945 une surveillante en chef du nom de Weniger est mentionnée. Dans les dernières listes connues des Kommandos de Flossenbürg du 13 avril 1945, apparaît le nom de Eggers. De façon exceptionnelle, les surveillantes en chef à Oederan occupaient les fonctions de chefs de Kommando.

Le personnel SS ne commit pas d’homicides volontaires à Oederan ; mais les registres matricules tout comme le registre des obsèques de la paroisse évangélique luthérienne mentionnent trois décès de déportées les 11 octobre 1944, 5 février et 10 mars 1945. Il n’y a pas d’autres décès inscrits à Oederan même, cependant plusieurs femmes ont témoigné qu’une déportée tchèque avait été conduite à Flossenbürg pour y être exécutée en raison de sa grossesse. Trois femmes enceintes furent transférées le 12 mars 1945 à Bergen-Belsen, où au moins l’une d’entre elles mourut (9). Dans les registres matricules figure le transfert d’une déportée hongroise, inscrite sous 2 matricules, vers Ravensbrück, le 17 novembre 1944. Quelques habitants de Oederan essayèrent de donner de la nourriture aux femmes.

Le Kommando de Oederan fut évacué le 14 avril 1945 (10). Les femmes furent transportées en train dans des wagons à bestiaux en direction de la Bohême mais errèrent environ une semaine dans la région d’Aussig sous le danger permanent des attaques aériennes, car, à cause des combats qui se rapprochaient, il n’y avait pas de voie possible pour accéder à un camp qui aurait pu les accueillir. Pour finir, on les transporta à Theresienstadt où elles furent libérées par l’Armée Rouge.

Une plaque commémorative fut apposée à l’usine textile ; celle-ci fut plus tard nationalisée et est aujourd’hui une fabrique privée de fil à coudre. Le complexe mortuaire pour les trois femmes décédées fut rénové par la ville de Oederan à l’occasion de la journée du souvenir de l’holocauste le 27 janvier 2005. Les investigations du bureau central du ministère public de Ludwigsburg furent suspendues en 1970 sans plus de résultat.

Anmerkungen

1     Schreiben der Erwin Kabis GmbH an die Sächsische Landesverwaltung/Justiz, 2.2.1946, in : StasdtA Oederan.

2     Abschrift eines irrtümlicherweise an das SS-Reichssicherheitshauptamt z. Hd. Herrn Standartenführer Maurer bzw. Herrn Hauptsturmführer Sommer gerichteten Schreibens der DKK GmbH, 24.6.1944, in : ebenda.

3     Abschrift eines Reiseberichts über den Besuch des KL. Flossenbürg am 8. und 9.8.1944, in : : BArch Berlin, NS 4/FL 393, Bd.2.

4     Monatliche Forderungsnachweise der Kommandantur Flossenbürg an die DKK Oederan für September bis Dezember 1944, in : ebenda. Tchécoslovaquie ; ces femmes avaient visiblement été déportées peu de temps auparavant

5     NARA, RG 338,290/13/22/3, 000-50-46, Box 537 (Mikrofilm-Kopie in : AGFI). Die beiden Transporte sind in den Nummerbüchern nicht einzeln aufgeschlüsselt, sondern unter dem Vermerk « v.Auschwitz 13.9.u 30.10. » aufgeführt.

6     Michael Düsing (Hrsg.), Wir waren zum Tode bestimmt. Lodz – Theresienstadt – Auschwitz – Freiberg – Oederan – Mauthausen, Leipzig 2002, S. 106.

7     Aussage Mina C., 9.2.1970, in : BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3215/66 (B).

8     übersendung von Passbildern bzw. Ausweisen durch die Kommandantur Flossenbürg nach Oederan am 5.10.1944 und 10.10.1944, in : BArch Berlin, NS 4/FL 10.

9     Schriftliche Mitteilung von Herbert Kolb, dem Bruder der verstorbenen Erna Neuberger, an die Gedenkstätte Flossenbürg.

10   Grete Salus, Ein Engel war nicht dort. Ein Leben wider den Schatten von Auschwitz, Leipzig 2005, S.89.

Literatur

Grete Salus, Ein Engel war nicht dort. Ein Leben wider den Schatten von Auschwitz, Leipzig 2005.

Michael Düsing (Hrsg), Wir waren zum Yode bestimmt. Lodz-Theresienstadt-Auschwitz- Freiberg- Oederan-Mauthausen, Leipzig 2002.

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.219, 220,221,222,223.

Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 22/12/2020.

Historique du Kommando de Hainichen

Un Kommando du camp de concentration de Flossenbürg fut installé en août 1944 dans la petite ville industrielle de Hainichen en Saxe, à 18 kilomètres au nord-est de Chemnitz. 500 déportées juives arrivant d’Auschwitz, durent y travailler pour les usines Framo GmbH à la fabrication de mitrailleuses, de lanceurs de brouillard et de lance-grenades.

Le 8 septembre 1944, le premier convoi amena environ 150 Juives polonaises à Hainichen. Elles avaient quitté le ghetto de Lodz qui venait d’être dissous pour rejoindre Auschwitz, où elles avaient été triées. Toutefois, en septembre, ne travaillaient aux usines Framo que 39 à 125 déportées (1). Le 8 octobre 350 autres déportées de Auschwitz arrivèrent à Hainichen, presque exclusivement des Juives hongroises. Les inscriptions dans les registres matricules de Flossenbürg mentionnent en plus deux Tchèques et quelques femmes sans mention de leur nationalité (2). Le nombre de femmes facturées pour le travail forcé s’élevait la plupart du temps entre 460 et 480, ce qui prouve clairement que beaucoup de femmes étaient soit malades soit trop faibles pour travailler. Certains jours, sans doute en raison des attaques aériennes, ne travaillaient que 170 femmes.

Les déportées étaient logées dans un bâtiment de deux étages avec grenier, qui avait dû être une fabrique d’aiguilles. La propriété, sur laquelle il n’y avait plus qu’un baraquement qui servait de cuisine, était entourée d’une clôture de fil de fer barbelé de deux mètres de haut ; deux miradors aux angles opposés étaient occupés 24 heures sur 24. À chaque étage, il y avait un dortoir pour les déportées et les gardes étaient logés sous les toits. Au rez-de-chaussée il y avait un bureau et une infirmerie comprenant une salle d’isolement. La majorité des 15 surveillantes-SS habitaient la ville de Hainichen. Elles avaient pour la plupart travaillé dans les usines Framo et avaient dû accepter de garder les déportées. Après une formation à Ravensbrück, elles prirent leur travail à Hainichen et surveillèrent les femmes surtout au travail : elles devaient empêcher les sabotages, les contacts avec d’autres travailleurs et la circulation clandestine d’objets (3). Fin octobre 1944, on attribua au Kommando deux nouvelles surveillantes en provenance du Kommando de Markkleeberg, un Kommando du camp de concentration de Buchenwald. Le chef du Kommando était le SS-Oberscharführer Wilhelm Loh, qui était gardien depuis 1939 au camp de concentration de Flossenbürg. D’après quelques sources, il aurait été envoyé à Hainichen fin juillet ou début août 1944 pour y créer ce camp extérieur (4). Sous la direction de Loh, il y avait en plus douze gardiens SS, dont six étaient affectés au service quotidien. Les gardiens venaient soit de Hongrie, soit appartenaient à l’armée de Wlassow. D’après les souvenirs de nombreuses femmes, les déportées étaient particulièrement maltraitées par la surveillante en chef Becker mais aussi par un SS-Rottenführer, Heinrich Michel.

Deux gardes SS escortaient les déportées sur environ un kilomètre jusqu’à la fabrique, où, réparties en deux équipes de douze heures chacune, elles devaient travailler le métal (fraisage, affûtage de canons etc…) dans l’atelier de construction d’armes. En plus des déportées, il y avait des prisonniers de guerre italiens, polonais et russes ainsi que des travailleurs civils tchèques embauchés dans les usines Framo ; quelques déportées tchèques réussirent à entrer en contact avec eux. En chemin, les femmes avaient des nouvelles du front. Les salles étaient mal chauffées, si bien que beaucoup de femmes souffraient de cystite. Elles pouvaient sortir mais toutes ensemble, à des heures précises et sous la surveillance des gardiennes. Elles devaient faire leurs besoins urgents dans des seaux à leur place de travail et sous les yeux des travailleurs, mais dans ce cas, la surveillante en chef les punissait en leur supprimant le déjeuner chaud (5).

La nourriture était très nettement insuffisante : les déportées avaient une soupe liquide deux fois par jour et un peu de pain le soir. Pourtant le directeur de l’usine avait clairement fait savoir que les usines Framo disposaient de nourriture en quantité suffisante pour le camp, ce qui fut bien pris en compte dans les demandes mensuelles. On peut penser que les gardiennes volaient de la nourriture en grande quantité. L’assistance médicale des femmes était elle aussi insuffisante : les médecins déportés, une femme médecin généraliste de Vienne et une dentiste de Klausenburg, tout comme les cinq infirmières ne pouvaient soigner les femmes qu’avec des cataplasmes et de la pommade. En cas d’accidents du travail, les femmes étaient soignées à l’usine et là sans doute mieux que dans le camp (6).

En dehors des médecins et de quelques femmes qui nettoyaient l’hébergement ou étaient de service de cuisine, il n’y avait pas de détenues chargées du fonctionnement du camp à Hainichen. La doyenne du camp, une Polonaise, est à peine mentionnée. Quelques femmes se souviennent de « doyennes de salle » qui devaient toutes être polonaises.

Les femmes parlent d’attaques aériennes fréquentes ; celles-ci entraînèrent un nombre élevé d’accidents du travail qui, en mars 1945, poussèrent les usines Framo à réclamer auprès de la Kommandantur de Flossenbürg une réduction de salaire pour travail non effectué par les déportées (en raison des alertes) depuis octobre 1945. La Kommandantur accepta ; les déportées durent rattraper une partie du temps de travail perdu (7).

Les déportées eurent à souffrir tout particulièrement de la surveillante en chef Gertrud Becker. Elle était poinçonneuse depuis 1943 dans les usines Framo et fut contrainte au travail obligatoire à partir du 1er septembre 1944. En raison de son teint mat et de ses cheveux noirs on lui donna le surnom de «hibou noir», «diable» ou «mort». À la moindre irrégularité, elle frappait les femmes et les insultait. Elle faisait souvent couper les cheveux des femmes et volait même la nourriture qui leur était destinée. Quand les femmes lavaient leurs vêtements, elle les obligeait à rester debout dans le froid glacial vêtu de leur linge mouillé (8). Becker fut directement ou indirectement responsable de plusieurs décès. Elle obligea une Polonaise qui souffrait des reins et pour cette raison était alitée à l’infirmerie à retourner au travail dans l’atelier de peinture ; ayant demandé à avoir un travail assis, elle fut, semble-t-il battue à mort par Becker et enterrée dans l’enceinte du camp (9). Le 1er octobre 1944 est mentionné dans les registres de matricules comme date de ce premier décès. Une jeune fille hongroise, qui avait pris des pommes de terre, fut frappée de la même manière par Becker, si bien qu’elle mourut quelques jours plus tard. Le chef du Kommando Loh, que toutes les femmes disent correct et une partie d’entre elles serviable, ne put ou ne voulut apparemment pas prendre des mesures contre le comportement de Becker. Au total cinq décès sont consignés. La mort fut cependant constatée par le médecin de l’entreprise et attestée officiellement par le bureau d’état civil de Hainichen (10).

D’après le rapport concernant la main d’œuvre du HSSPF Elbe, il y avait 498 déportées fin janvier 1945 à Hainichen, 494 fin février ; le nombre de leurs gardiens resta constant : 10 gardiens SS et 25 surveillantes.11 Dans le dernier rapport du 13 avril, il y a à nouveau 500 déportées notées pour Hainichen. Même le 5 avril arrivèrent à Hainichen six femmes juive vraisemblablement évacuées à pied de Gross-Rosen sur Flossenbürg.

Le directeur du Kommando Wilhelm Loh déclara avoir décidé lui-même de l’évacuation du Kommando ; en revanche les femmes disent à l’unanimité que l’évacuation eut lieu aussitôt après une attaque aérienne dans la panique et le chaos total (12). Les femmes durent d’abord aller à pied, puis elles furent chargées dans des wagons, mais on ne sait pas où, et transportées vers Aussig (Usti nad Labem). Dans ce convoi il y avait aussi 500 déportées, supposées être des Polonaises non-juives, des Ukrainiennes et des Yougoslaves, sans doute en provenance du Kommando de Chemnitz. Certaines racontent que le convoi se serait arrêté au bord d’une rivière, où elles se seraient lavées et auraient essayé de faire cuire des mauvaises herbes et de l’herbe ; d’autres se souviennent d’un long arrêt dans la ville de Aussig bombardée. À partir de là, les femmes durent continuer à pied ; les malades suivirent en voiture (13). Après plus d’une semaine, n’ayant pratiquement rien eu à manger, elles arrivèrent épuisées à Leitmeritz, où elles laissèrent les Ukrainiennes et les Yougoslaves. Les femmes de Hainichen furent conduites à Theresienstadt où les troupes soviétiques les libérèrent le 8 mai.

Après la guerre au moins 15 des surveillantes SS furent internées par la force d’occupation soviétique (14). Deux d’entre elles moururent dans le camp spécial de Mühlberg, les autres quittèrent le camp de Mühlberg en septembre 1948 ; elles furent conduites à Buchenwald dans le camp spécial qui s’y trouvait, et elles y restèrent enfermées jusqu’à février/mars 1950. La surveillante en chef Gertrud Becker fut condamnée à la perpétuité lors du «procès de Waldheim» et resta en prison jusqu’à fin 1955 ; à la fin  elle était incarcérée à la prison de Hoheneck. Elle alla s’établir en République Fédérale. Un tribunal américain condamna Wilhelm Loh à mort ; la peine fut commuée en une peine d’emprisonnement de 20 ans, dont Loh fit huit ans à Landsberg. Les enquêtes de Ludwigsburg furent prises en charge par le parquet de Hanovre.

L’usine de Hainichen servit après la guerre au constructeur automobile «Barkas» ; aujourd’hui c’est le mandataire automobile ISE qui occupe les locaux restants. La ville envisage de mettre une plaque commémorative.

Anmerkungen

1     Forderungsnachweise der Kommandantur Flossenbürg an die Framo-Werke Hainichen für September bis Dezmber 1944 in : BArch Berlin, NS 4/FL 393, Bd.2.

2     NARA, RG 338, 290/13/22/3, 000-50-46, Box 537 (Mikrofilm-Kopie in : AGFI).

3     Aussage Loni D., 21.1.1970, in : BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR -Z 54/70.

4     Aussage Wilhelm L., 10.6.1969 in : ebenda.

5     Aussage Sara R., 15.12.1969, in : ebenda.

6     Aussage Rosalia Y., 30.12.1969, in : ebenda.

7     Schreiben der Framo-Werke an die Waffen-SS, Kommandantur – Arbeitseinsatz in Flossenbürg, 6.3.1945, in : BArch Berlin, NS 4/FL 351.

8     Aussage Zipora P., 6.11.1969, in : BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR -Z 54/70.

9     Aussage Celina Z.,8.5.1969, in : ebenda.

10   Aussage Gertrud B.,13.10.1970 in : ebenda.

11   Stärkemeldung der Wachmannschaften und Häftlinge der Arbeitslager im Dienstbereich des HSSPF des SS-Oberabschnitts ELBE nach dem Stand vom 28.2.1945 und 31.3.1945, in : ITS Arolsen, Historisches Archiv, Flossenbürg-Sammelakt 10, Bl. 71 und 85.

12   Aussage Zipora P., 6.11.1969, in : BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR -Z 54/70.

13   Aussage Sidonie K., 11.12.1969, in : ebenda.

14   Mit einer Ausnahme wurde gegen sie kein Gerichtsverfahren eingeleitet. Auskunft der Gedenkstätte Buchenwald.

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.132, 133, 134, 135, 136.

Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 30 décembre 2020.

Historique des Kommando de Dresden  –  K 4

Dresden – Behelfsheim

L’existence de ce camp extérieur n’est connue que par une liste de transfert du camp principal de Flossenbürg « vers le camp de travail de Dresden Behelfsheim, le 13 avril 1945 ».1. En réalité elle est datée du 12 avril 1945.Le camp extérieur de Dresden (Behelfsheim) est ainsi le dernier camp extérieur de Flossenbürg – peu après le transfert d’un peu plus de 100 déportés le camp principal de Flossenbürg fut évacué, la plupart des déportés furent entraînés dans les marches de la mort en direction du sud.

Alors que le titre de la liste indique 105 déportés, seuls 103 noms sont notés. En plus de six citoyens allemands, parmi lesquels quelques –uns au moins devaient tenir le rôle de Kapo, sont mentionnés 43 Polonais (travailleurs civils, détenus en préventive ainsi que 18 Juifs), 30 Russes (travailleurs civils, prisonniers de guerre et un Juif)  sept Tchèques ainsi que deux Croates, deux Juifs hongrois, deux Néerlandais, un Yougoslave, un Slovène et un Italien ; parmi eux relativement beaucoup de déportés « d’un certain âge » (il n’y avait que 23 déportés nés entre 1897 et 1910). Il y avait beaucoup d’ouvriers non spécialisés dans ce transport, mais aussi pour moitié des artisans, tels que serruriers, fraiseurs, électriciens ou menuisiers. Comme c’était l’usage sur beaucoup de listes de transport, l’état général est, là aussi, précisé sous forme de note ; pour la plupart il fut évalué par le médecin du camp responsable par -2- (apte au travail).

En comparant avec les notifications des registres de matricules de Flossenbürg, il est évident que beaucoup de déportés envoyés dans ce convoi devaient se trouver dans un état physique extrêmement mauvais. Pour certains déportés les notes n’indiquent pas superficiellement les maladies ou quelque chose de tel : Ainsi parmi ceux qui ont été envoyés il y a trois Juifs polonais, qui, en août 1944, arrivèrent à Flossenbürg en provenance du camp de concentration de Plaszow. Peu de temps avant d’être envoyés à Dresde, beaucoup d’entre eux étaient cependant retournés à Flossenbürg, arrivant des camps extérieurs, dans lesquels des maladies sévissaient et faisaient de nombreuses victimes, comme à Ansbach et Zwickau. D’autres, qui d’après les registres de matricules arrivaient directement de Flossenbürg, ont la mention « K » pour Krankenrevier très exactement, suivie des numéros des blocks de quarantaine 22 et 23. Pour quelques déportés il n’y a absolument aucune mention sous les numéros matricules correspondants de la source principale ; la liste de transfert représente juste la seule preuve connue et nominale de leur destin.

On ne sait pas vraiment en quoi consistait le camp extérieur (Behelfsheim). En raison des évènements esquissés, c’est-à-dire de la période tardive du convoi, de l’état de santé vraissemblablement mauvais des déportés et de la moyenne d’âge relativement élevée, on pense qu’il a fallu éloigner les déportés malades du camp principal déjà surchargé. De plus ce convoi tardif s’ajoute à une série de transferts qui –sans doute pour la même raison- eurent lieu peu avant la dissolution du camp principal de Flossenbürg vers différents camps extérieurs, mais presque toujours en direction du sud.

1 Überstellungen von Flossenbürg in Aussenlager, in :CEGESOMA, Mikrofilm14368

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p. 77, 78.

Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 25 avril 2014.

Dresden  –  Goehle–Werk

La formation du camp extérieur dans la Goehle-Werk s’inscrit dans la création à Dresden de plusieurs kommandos du camp de concentration de Flossenbürg importants pour l’armement. Après l’atelier de réparation de la Reichsbahn (12 septembre 1944) et juste avant le MIAG-Werk à Zschachwitz près de Dresden (13 octobre 1944), chacun avec des détenus masculins, furent érigés deux kommandos de femmes le 9 octobre 1944.

 L’un dans le Goehle-Werk de Zeiss-Ikon AG, l’autre dans l’entreprise Universelle. Un autre vit le jour deux semaines plus tard dans l’usine Zeiss Ikon de Reick. La mobilisation tardive comparée des camps de concentration de détenus à Dresden repose, entre autre, sur une industrie en grande partie non compatible avec l’armement, qui pendant la guerre avait en grande partie cessé le travail et qui ainsi mettait à disposition des espaces pour des transferts d’entreprises hors de villes sans doute menacées de violents bombardements (1).

Le Goehle-Werk (également orthographié « Goehlewerk » dans de nombreux actes) au nord-ouest de Dresden (Riesaer Str.32) faisait partie de la Zeiss Ikon AG, qui résultait de la fusion de plusieurs firmes, entre autre les usines photographiques de Heinrich Ernemann et de Ica AG également de Dresden et sous la direction de la fondation Carl-Zeiss. Dans les quatre usines de Dresden de même qu’à Berlin et Stuttgart, Zeiss Ikon produisait depuis l’appareil photos Contax jusqu’au projecteur de films une vaste palette de matériels optiques et d’accessoires cinématographiques. Un changement de production conditionné par la guerre en matériel d’armement comme des instruments spéciaux pour la Luftwaffe eut lieu dans toutes les usines Zeiss-Ikon ; mais dès le début la Goehle-Werk fut planifiée pour être une usine d’armement pour la fabrication de munitions et construite en 1940/1941. Ceci ne se traduisait pas que par une architecture typique de la fin des années trente, qui devait faire résister aux bombes les bâtiments industriels en béton armé munis de toutes petites fenêtres et de cages d’escaliers renforcées, mais aussi par l’embauche massive au nom du travail obligatoire de travailleurs non qualifiés, plus exactement non spécialisés, surtout des femmes, comme par exemple les juives de Dresden et des travailleuses du travail obligatoire étrangères, et enfin de déportées du camp de concentration de Flossenbürg. Dans la Goehle-Werk on fabriqua entre autres des bombes à retardement, des obus incendiaires pour le 12,8 cm- Flak et le 8,8 cm –Flak, des détonateurs de bombes (2)Les productions répondaient à des ordres de très haute priorité et furent assumées en partie par le programme Flak du programme des avions de chasse – peut-être une condition pour l’affectation de déportés.

D’après un document du bureau des salaires de Zeiss Ikon, 200 « travailleuses de camp de concentration » furent attribuées, le 18 octobre 1944, à la Goehle-Werk, le 28 octobre 1944, 300 autres ; et on en espéra encore 200. Les femmes eurent non seulement des matricules réservés dans le registre des travailleurs de l’usine, mais aussi des cartes Hollerith de salaire, avec un cachet imprimé « travailleuse de camp de concentration » accompagné du numéro matricule de la déportée, à défaut de nom (3).

Dans un premier temps, la firme réglait d’autres éventualités comme la garde et la déduction de séjours à l’hôpital ainsi que la déclaration de tentatives d’évasion. Le jour de la première affectation de déportés fut indiqué – sûrement par erreur – comme étant le 18 octobre 1944. Pourtant le registre de comptabilité de la cuisine de Goehle-Werk mentionne en octobre 1944 pour « le camp de travail 453 » (c’est la désignation interne à l’usine pour les registres de comptes) des prélèvements et des débits « d’alimentation de déportés du 8 au 31 octobre 44 ».

Cette date est confirmée, tout comme les données chiffrées ultérieures du protocole, par les registres de matricules des déportés du camp de concentration de Flossenbürg.4. Il y est consigné un convoi de 200 femmes en provenance de Ravensbrück sur « Dresden Zeiss Ikon » en date du 9 octobre 1944 ; à part deux Françaises, le transfert ne concernait que des Russes et des Polonaises. On ignore d’après quels critères elles avaient été choisies. Pour le 24 octobre 1944, les registres de matricules font état d’un convoi de 300 femmes venant d’Auschwitz.

À l’exception de quelques déportées allemandes, italiennes et yougoslaves, il s’agissait encore de femmes russes et polonaises, pour la plupart déportées politiques ou de « travailleuses civiles ». Un dernier convoi de 197 femmes venant de Ravensbrück est prouvé le 14 décembre 1944 ; on y trouve, en plus des Russes et des Polonaises, de nombreuses déportées allemandes et françaises, auxquelles il faut ajouter quelques Luxembourgeoises, Italiennes, Tchèques et même une Égyptienne.

Tous les témoignages affirment que l’alimentation fournie par l’usine était très insuffisante. Une comparaison des dépenses de cuisine de l’usine pour le mois de décembre 1944 avec les justificatifs correspondants de fournitures traduit une ration d’environ une livre de pain par jour et par déporté, en supposant que les quantités décomptées aient bien été distribuées aux femmes.

On peut indirectement tirer des conclusions sur les conditions de vie extrêmement difficiles pour les femmes dans la Goehle-Werk. Ainsi dans les registres de matricules tout comme dans les rapports de la Kommandantur à Flossenbürg sont consignées continuellement des tentatives d’évasion, qui du moins après la grande attaque de février 1945 avaient des chances de réussir.5 Dès le 24 octobre 1944, deux Russes tentèrent de fuir, au moins l’une d’entre elles fut cependant reprise et envoyée le 6 décembre 1944 à Ravensbrück. Quelques autres tentatives isolées, la dernière le 5 avril 1945, expriment l’intensité de la douleur des femmes. L’arrivée de deux soignantes du kommando de Neurohlau en novembre 1944 fait aussi penser que la santé des femmes était déficiente. La mobilisation pour le travail des déportées ne joue pas un grand rôle dans leurs témoignages ; son ampleur se révèle dans les demandes du service d’embauche de la Kommandantur de Flossenbürg.6. A partir du 9 octobre 1944, on décompta 190 ouvrières non spécialisées, tandis qu’à partir du 30 octobre 1944, on en ajouta 492, et 679 à partir du 11 décembre 1944. En raison des attaques aériennes les 13 et 14 février 1945, aucune ou très peu de femmes travaillèrent à la journée entre les 14 et 20 février. La dernière répartition du travail du 13 avril 1945 fait mention d’un total de 684 déportées. Il y eut quelques transferts en provenance de Neurohlau, ainsi que des renvois de quelques femmes à Ravensbrück, et entre autres un transfert de cinq femmes au kommando de Chemnitz pour les Astra-Werke le 12 février 1945.7

La surveillance était assurée, d’après les témoignages des déportées, par des gardiennes (de la SS), qui étaient armées de matraques en caoutchouc et n’hésitaient pas à frapper.

Le 25 octobre 1944, la Kommandantur de Flossenbürg envoya à la gardienne en chef Gertrud Schäfer des autorisations pour 17 gardiennes. Un relevé non daté fait état de 22 gardiennes pour Goehle-Werk, qui toutes venaient d’un stage de formation à Hölleischen.8 Toutes les femmes étaient originaires de Dresden et des environs, ce qui laisse penser qu’elles avaient toutes déjà été employées chez Zeiss Ikon. La gardienne en chef à la Goehle-Werk fut jusqu’en février 1945 Gertrud Schäfer, lui succéda la gardienne de Hueber décrite par la plupart des déportées comme dure et cruelle. Les femmes étaient logées à l’usine, les postes de travail se trouvaient un ou deux étages plus bas.

Pendant les bombardements du 14 février 1945, les femmes étaient enfermées dans leur hébergement. Quelques-unes profitèrent du chaos qui suivit l’attaque pour fuir. La belle-sœur de l’une d’elles, qui avait réussi son évasion, fut rendue sourde d’une oreille à force de coups et retenue une semaine en détention dans le bunker.

Deux décès sont enregistrés pour le mois de novembre 1944, un autre plus tardif, « traitement spécial » d’une déportée russe au camp principal de Flossenbürg, en janvier 1945.

« L’évacuation » du camp eut lieu à la mi-avril 1945 par train et à pied le long de l’Elbe. Le but était Leitmeritz. Bien avant d’y arriver, les déportées furent libérées, beaucoup avaient fui.

Au « procès de la Goehle-Werk » en janvier 1949, dix accusés, parmi lesquels Nitsche, le directeur adjoint, ainsi que plusieurs contremaîtres et des gardiennes SS furent condamnés à une peine d’emprisonnement allant de un à huit ans. Le ministère public de Ludwigsburg clôtura ses enquêtes vingt ans plus tard et conclut qu’aucun homicide de déportée n’était prouvé. L’ancienne Goehle-Werk fut jusque dans les années qui suivirent la fin de la RDA le siège de l’édition saxonne et d’autres entreprises d’édition et d’impression ; après restauration, elle est aujourd’hui utilisée comme local industriel.

1   Alexander Fischer, Ideologie und Sachzwang, Kriegswirtschaft und – Ausländereinsatz – im südostsächsischen Elbtalgebiet, in: Sächsisches Staatsministerium des Innern (Hrsg.),Fremd – und Zwangsarbeiter in Sachsen 1939-1945, Halle/Saale 2002, S.12-26, hier : S.13 f.

2   Kriegsauftrag Kolben mit Uhrwerk SS 563-1- 5115, in: Sächs. HStA Dresden, 11722, Ernemann-Werke AG/ Zeiss Ikon AG Dresden, Nr 424.

3   Ebenda, Nr 319 Werksküchen.

4   NARA, RG 338, 290/13/22/3, 000-50-46, Box 537 (Mikrofilm-Kopie in : AGFI)

5   Fluchtmeldungen vom 29.10.1944 bzw. für den 3.3 und 7.3.1945 in: CEGESOMA, Mikrofilm 14368.

6   Forderungsnachweis für Oktober 1944, in: BArch Berlin, NS 4/FL 393, Bd. 2. Abgerechnet wurden nur die tatsächlich zur Arbeit eingesetzten Häftlinge.

7   Überstellungen, in: CEGESOMA, Mikrofilm 14368.

8   BArch Berlin, NS 4/FL 10.

Littérature

Victor Klemperer, “Ich will Zeugnis ablegen bis zum letzten” Tagebücher 1933 – 1945. Berlin 1995.

Henny Brenner,« Das Lied ist aus » – Ein jüdisches Schicksal in Dresden, Zürich/München 2001.

Hans Brenner, “KZ Zwangsarbeit während der NS-Zeit im Dresdner Raum”, in: 4. Kolloquium zur dreibändigen Dresdner Stadtgeschichte 2006 vom 18.März 2000, hrsg. von der Landeshauptstadt Dresden, S. 53 – 62.

Reinhardt Balzk, “ Zwangsarbeiter in Dresden” hrsg. von der PDS-Fraktion im Dresdner Stadtrat, September 2001 (http://www.pds-dresden.de/doku/zwangsarbeiter.pdf, 8 Seiten, letzter Zugriff 18.01.06)

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.82, 83, 84, 85.

Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 3 décembre 2014.

Dresden  –  Reichsbahnausbesserungswerk

Le kommando de Dresden (Reichsbahnausbesserungswerk/RAW) sur la rive de la Weisseritz fut créée le 12 septembre 1944. À cette époque une nombreuse main d’œuvre étrangère était déjà embauchée dans la RAW de Dresde et dans d’autres entreprises de la Reichsbahndirektion (RBD), avant tout des « travailleurs de l’est » et des Belges, des prisonniers de guerre britanniques et des internés militaires italiens. En plus de ceux-ci, est mentionné dans les « informations internes à l’usine concernant les capacités en main d’œuvre des camps » un camp pour déportés de camp de concentration, pour lequel sont notés 300 déportés pour le 15 septembre, 299 pour le 15 octobre et 597 pour le 15 novembre 1944 (1).

 Les 300 premiers déportés arrivaient de Varsovie – une partie d’entre eux avait participé à l’insurrection de Varsovie – et après un court emploi dans les usines Heinkel au titre du travail obligatoire au camp de concentration de Sachsenhausen, ils avaient été conduits à Dresden le 14 septembre 1944 (2). Mis à part un déporté allemand et un déporté français, les registres de matricules de Flossenbürg ne mentionnent dans ce convoi que des « travailleurs civils » polonais (3). Un deuxième groupe fut transféré du camp de concentration de Gross-Rosen à Dresden  par un convoi le 25 octobre 1944. La grande majorité de ces 300 déportés était constituée de « déportés en détention préventive » et de travailleurs civils polonais et russes, auxquels s’ajoutaient quelques Tchèques, Lituaniens, Allemands, français et Croates. Des déportés politiques, des « asociaux » isolés et des tsiganes formaient une toute petite partie.

Les justificatifs de la kommandantur de Flossenbürg indiquent formellement le 15 septembre 1944 comme « début du kommando » (4).Dèsle 30 septembre 1944, un premier déporté mourut. Jusqu’à l’arrivée du deuxième convoi le 27 octobre, le nombre de déportés effectivement embauchés au titre du travail obligatoire passa de 300 à 281, ce qui renseigne sur l’aggravation des conditions de vie ; ces hommes devaient aussi travailler toute la moitié du dimanche. Jusqu’à la fin de l’année le nombre de déportés au travail passa de 586 maximum à environ 540 à la fin décembre 1944.

Les hommes devaient réparer des wagons endommagés de la RAW dans un secteur spécifiquement prévu pour « déportés de camp de concentration chargés de la réparation de wagons de marchandises » (5). Les déportés de Sachsenhausen, plus exactement de Gross-Rosen, devaient travailler en deux équipes de chacune douze heures ; d’après les dires de l’ancien déporté Zbigniew Kolakowski, ils se rencontraient pour la première fois, depuis que leur hébergement à Dresden avait été détruit lors des attaques aériennes sur Dresden (6).

D’après d’autres dépositions, les déportés étaient logés dans le même hangar à locomotives non chauffé, mais travaillaient à différents endroits. En fait les mentions dans les registres de matricules de Flossenbürg montrent des différences énormes entre les deux convois. Mais avant tout elles renseignent sur les conditions catastrophiques dans le kommando de la RAW. Visiblement, on craignait de la part des déportés en général des tentatives d’évasion dans le secteur de la Reichsbahn. En tout cas, le directeur chargé de l’unité décida immédiatement d’un signe distinctif pour reconnaître les déportés, à savoir un brassard sur le modèle des déportés embauchés dans la RAW de Jena (7).

Trois jours avant ce décret, le 25 octobre 1944, trois déportés « avaient été abattus lors d’une évasion ». D’après des témoignages postérieurs, les déportés essayaient de sortir du secteur bouclé du kommando, cachés sous les essieux des wagons réparés. Et d’après les registres de matricules au moins cinq hommes furent abattus en novembre et décembre 1944 ; on ne sait pas quelle fut l’issue des autres évasions. Le très mauvais approvisionnement, mais aussi les brutalités sur quelques déportés étaient responsables de ces actes de désespoir (8). Au total moururent 24 déportés du convoi de Sachsenhausen à Dresden et au moins 55 du convoi de Gross-Rosen.

Le responsable en était le chef de kommando SS-Hauptsturmführer Rudolf Becher de Falkenau, qui mourut en 1946, prisonnier de guerre en Union Soviétique. Nous n’avons pas d’informations précises sur l’importance de la garde, qui était logée dans les ateliers du bâtiment. Des listes non datées de livraison d’armes et de munitions mentionnent entre 25 et 32 membres de la SS de rang inférieur, parmi lesquels des Allemands de Hongrie et des Ukrainiens (9).

Visiblement le convoi en provenance de Gross-Rosen était particulièrement affecté par les bombardements sur Dresden les 13 et 14 février 1945, ce que révèlent les différents postes de travail des deux groupes de déportés. 32 décès sont répertoriés à la date du 20 février 1945 et 19 autres pour le 22 février.

Les 514 survivants furent transférés dès le 19 février par train, au camp principal de Flossenbürg (10). Au cours de ce transfert au moins 15 déportés s’évadèrent ; d’après des témoignages concordants ils s’échappèrent par un trou dans la cloison de wagon, tandis que la garde SS tirait sur le wagon. Nombreux sont les déportés transférés qui moururent peu de temps après à Flossenbürg. Les autres furent envoyés dans différents kommandos, où une partie d’entre eux dut à nouveau travailler pour la Reichsbahn, ou bien carrément dans des camps de la mort. Les survivants du convoi de Sachsenhausen allèrent pour la plupart à Ohrdruf, kommando du camp de concentration de Buchenwald, à Offenburg, kommando du camp de concentration de Natzweiler ainsi que dans la RAW de Regensburg. Les déportés du convoi de Gross-Rosen furent envoyés principalement à Leonberg, kommando du camp de concentration de Natzweiler, ainsi qu’à Ansbach, Kirchham et Pottenstein, kommandos de Flossenbürg.

Dans le registre des lieux de détention du service international de recherche, le 13 avril 1945 est la dernière date indiquée pour le kommando de la RAW de Dresden, date à laquelle le département du travail du camp principal de Flossenbürg mentionne encore quatre déportés pour ce kommando. La conclusion des enquêteurs de Ludwigsburg est la suivante : « Les anciens déportés entendus datent la période de la dissolution du camp annexe à la fin février 1945 ou quelques jours après le bombardement de Dresden. » (11). Il ne reste aujourd’hui presque rien de l’ancienne usine de réparation de la Reichsbahn. La grande salle. II fut démolie il y a quelques années, une stèle à la mémoire des déportés décédés fut retirée lors des projets de construction et elle se trouve aujourd’hui devant une habitation sur l’Emmerich-Ambros-Ufer.

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1   Sächs. HStA Dresden, 11698 A, RAW Dresden, Nr. 37.

2   Aussage Karol S., 3.7.1970, in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3032/66.

3    NARA, RG 338, 290/13/22/3, 000-50-46, Box 537 (Mikrofilm-Kopie in: AGFI).

4   Monatliche Forderungsnachweise der Kommandantur Flossenbürg (Abt. Arbeitseinsatz) an das Reichsbahnausbesserungswerk Dresden für Oktober bis Dezember 1944, in: BArch Berlin, NS 4/FL 393, Bd. 2.

5   Sächs. HStA Dresden, 11698 A, RAW Dresden, Nr. A 37, Bl. 51.

6   Mündliche Auskunft von Zbigniew Kolakowski am 23.7.2004.

7   Sächs. HStA Dresden, 11698 A, RAW Dresden, Nr. A 166.

8   Aussagen Teofil Marian K., 12.2.1976, und Eryk N. , 23.2.1976, in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 152/76.

9   BArch Berlin, NS 4/FL 428.

10 AVG, vorl. Signatur 2121, Lagerstärkemeldung vom 20.2.1945.

11 Schlussvermerk, 15.4.1976, in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3032/66.

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.85, 86, 87, 88. Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 24/02/2015.

Dresden-Reick

L’usine Ica au 40 Mügelner Strasse à Reick, un quartier au sud-est de Dresde, était l’une des quatre usines de Dresde de la Zeiss Ikon AG et devint en octobre 1944 le lieu d’un camp extérieur comme la Goehle-Werk. Déjà avant la création du camp de concentration de nombreux étrangers, hommes et femmes pratiquement à égalité, travaillaient au nom du travail obligatoire dans l’usine Reick, comme d’ailleurs dans les autres implantations de Zeiss-Ikon ‘1). Les noms des femmes sont intégralement indiqués dans les registres de matricules de Flossenbürg, qui indiquent que le convoi du 24 octobre 1944 alla directement du camp de concentration d’Auschwitz à Dresde. À part une Allemande, une Yougoslave et une Italienne, il n’y eut que des Polonaises et des Russes au camp annexe de Reick. Pour la période d’octobre à décembre 1944, on réussit à comprendre le nombre des déportés grâce aux pièces justificatives exigées du département du travail de Flossenbürg. Il en résulte qu’à partir du 22 octobre, 200 femmes furent réclamées, un chiffre qui resta constant malgré quelques variations à la baisse. Au contraire de la Goehle-Werk quelques-unes des femmes de l’usine Reick devaient aussi travailler de temps en temps le dimanche.

Il n’existe de pas de témoignages précis sur le travail des déportés. Les informations données dans les dossiers d’enquêtes du bureau central des administrations judiciaires régionales concernant l’hébergement des déportés sont contradictoires, mais indiquent majoritairement que les femmes étaient hébergées dans les bâtiments de l’usine. Il n’est pas mentionné d’homicides volontaires dans l’usine de Reick, ce qui explique que le bureau central de Ludwigsburg ait arrêté les enquêtes dans les années 60 (2). Toutefois au moins un rapport de retour mentionne l’assassinat d’une déportée : le 23 décembre 1944, une « travailleuse civile » russe fut transférée à Flossenbürg, le rapport du bureau des écritures du camp de Flossenbürg porte la mention «  SB [Sonderbehandlung] (traitement spécial) 3 .1.45 » ainsi qu’une croix. Les transferts de deux infirmières de détenues du camp annexe de Neurohlau à Dresden-Reick début février 1945 sont également prouvés ainsi que quelques retours du camp annexe de Reick à Flossenbürg er Bergen-Belsen. Le chef du kommando à l’usine Reick était le SS-Oberscharführer Olschewski, à qui succéda le SS-Unterscharführer Johann Heinz (3). Fin janvier 1945, les 194 détenus étaient gardés par 4 hommes de garde et 19 surveillantes (4).Quelques-unes des premières surveillantes à Reick avaient été envoyées de Zschopau, où également dans un camp annexe du camp de concentration de Flossenbürg, elles devaient surveiller des femmes déportées ; mais celles-ci n’étaient pas encore arrivées (5).Jusqu’à la fin février, le nombre des surveillantes tomba à douze ; elles gardaient 388 détenus avec huit hommes de garde.

Après l’attaque aérienne du 14 février 1945, les femmes furent mises à contribution pour les travaux de déblaiement. Le 25 février 1945, un autre grand convoi de 200 femmes arriva de Bergen-Belsen à « Dresden Zeiss Ikon » ou « Dresden Reik » (sic). Les femmes étaient majoritairement des Juives hongroises, mais il y avait aussi quelques Juives allemandes, françaises, grecques, italiennes et tchèques, ainsi que des « travailleuses civiles » russes, qui avaient été, en partie, déplacées d’Auschwitz à Bergen-Belsen. Peu de temps après leur arrivée une épidémie de typhus se déclara dans le camp ; elle fit de nombreuses victimes. Dans les dossiers du cimetière de Dresde qui datent de l’après-guerre, sont mentionnées 18 femmes décédées entre le 20 mars et le 7 avril ; elles furent, comme d’autres déportées, inhumées au Johannisfriedhof de Dresde, mais enregistrées par erreur comme étant des déportées du camp annexe de Zschachwitz (6). Dans les registres de matricules de Flossenbürg 23 décès sont mentionnés entre le 5 mars et le 8 avril 1945. C’étaient exclusivement des femmes apparemment très affaiblies du second convoi qui était resté très isolé. Une femme témoigne de 36 décès et précise qu’un SS-Oberscharführer de Hongrie avait fait venir dans le camp un médecin juif de sa ville d’origine pour s’occuper des malades (7). D’autres femmes parlent d’un nombre beaucoup plus élevé de victimes du typhus, sans précisions supplémentaires.

Quelques femmes mirent à profit la situation décrite comme chaotique pour s’enfuir, d’après les registres de matricules, huit femmes s’évadèrent dans la seule journée du 27 avril 1945 et une autre le 22 mars 1945. D’après le dernier un rapport sur l’effectif du 13 avril 1945, il y avait 362 détenues dans le camp annexe de Reick.

Dans les dossiers d’enquêtes, on trouve des renseignements extrêmement contradictoires sur la dissolution du camp et le sort réservé aux femmes. Les témoignages concordent pour dire que le camp fut évacué fin avril 1945, et que les femmes furent conduites vers la frontière tchèque (certaines parlent de la bourgade de Hellendorf), où elles furent libérées par les troupes soviétiques.

Après la guerre, l’industrie optique utilisa les bâtiments de l’entreprise et aujourd’hui, ils abritent un centre de formation. Rien ne rappelle l’ancien kommando.

1   Zwischen April 1942 und Dezember 1944 mussten im Werk Reick bis zu 671 Ausländer arbeiten. Meldung der beschäftigten Ausländer (einschl. Juden) und Kriegsgefangenen, in: Sächs. HStA Dresden, 11722, Ernemann – Werke AG/ Zeiss Ikon AG Dresden, Nr 205.

2   BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3016/66.

3   Schlussvermerk, in: ebenda.

4   Stärkemeldung der Wachmannschaften und Häftlinge der Arbeitslager im Dienstbereich des HSSPF des SS-Oberabschnitts-ELBE nach dem Stand vom 31.1.1945 und 28.2.1945, in: ITS Arolsen, Historisches Archiv, Flossenbürg-Sammelakt 10, BL. 54 und 70.

5    Für diesen Hinweis danke ich Pascal Cziborra, Lemgo.

6   Liste der Gräber der Widerstandskämpfer auf dem Johannisfriedhof, in : StA Dresden, 9.1.14. Nr 778.

7   Aussage Sara N., 23.7.1967, in : BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3016/66.

Littérature

Hans Brenner, KZ- Zwangsarbeit während der Nazi-Zeit im Dresdner Raum, in :4. Kolloquium zur dreibändigen Dresdner Stadtgeschichte 2006 vom 18. März 2000, hrsg. Von der Landeshauptstadt Dresden, S. 53-62.

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.96, 97, 98.

Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 15/01/2015.

Dresden  –  SS-Pionier-Kaserne

Le kommando de la SS-Pionier-Kaserne fut le deuxième des kommandos du camp de concentration de Flossenbürg et le premier kommando installé à Dresde. Sur le terrain du « Hellerhof » fondé en 1894 dans le quartier de Trachenberge, sur lequel depuis 1934 une coopérative qui luttait contre la mortalité des nourrissons, avait élevé des ânes pour obtenir du lait pour les bébés (1), des déportés furent contraints durant plus de trois ans d’effectuer des travaux pour la direction SS de construction de Dresde, surtout pour construire des hébergements pour le SS-Pionier-Ersatzbataillon, mais aussi dans des lieux à l’extérieur de Dresde. Les cent premiers déportés arrivèrent du camp de concentration principal de Flossenbürg à Dresde en juin 1942. D’après les listes de transferts triées par métiers, il s’agissait presque exclusivement d’ouvriers spécialisés du bâtiment (maçons, couvreurs, charpentiers et ébénistes, plombiers, peintres, électriciens et serruriers). Après la dissolution du kommando de Stulln 99 autre déportés arrivèrent à Dresde à la mi-octobre 1942. Les premiers étaient majoritairement des « prisonniers allemands en détention préventive » et des « asociaux », souvent depuis déjà plusieurs années en camp de concentration, il y avait aussi à Dresde, mais ils étaient peu nombreux, des déportés polonais, russes et tchèques. L’arrivée de deux couvreurs venant du camp de concentration de Sachsenhausen à Dresde en août 1942 est le premier cas mentionné d’un transfert en provenance d’un camp principal dans le kommando d’un autre camp principal.

Les quelques 200 déportés durent d’abord construire un hôpital militaire dans la SS-Pionierkaserne. À partir d’octobre 1943 des détenus de Dresde avec d’autres consolidèrent le château de Neuhirschstein, situé sur l’Elbe à environ dix kilomètres en aval de Meissen, dans lequel, plus tard, la famille royale belge fut retenue prisonnière. De plus, ils furent employés à d’autres projets de construction de la direction des travaux SS, comme la construction d’un hôpital à Seifhennersdorf ; en règle générale ils étaient aussi mis à la disposition d’entreprises privées qui marchaient bien. D’après Hans L., un membre de la SS, qui, après une blessure, fut détaché à la direction des travaux à Dresde, la direction des travaux contrôlait entre autres la construction de camps de baraquements, la transformation d’écoles en hôpitaux et le déblaiement des dégâts causés par la guerre (2). Le règlement fut appliqué différemment que dans le cas de kommandos dans l’industrie d’armement.

C’est ainsi que le SS-Pionier-Ersatz-Bataillon était en charge des vivres pour les déportés, ainsi que de leur affectation (3).A partir d’avril 1944, il ne fallait plus rembourser les coûts de main d’œuvre figurant dans les justificatifs. D’autre part les kommandos externes devaient aussi être approvisionnés sur le contingent de vivres, ce qui de toute façon aggravait le manque déjà existant. Le surplus de consommation du kommando de Neuhirschstein « suite au surcroît de travail et au travail de nuit » fut par exemple à nouveau économisé sur les livraisons à Dresde. La demande des déportés de Dresde d’utiliser leurs comptes bloqués pour l’achat de pommes de terre fut rejetée (4).

La composition quantitative et qualitative des déportés dans le kommando de la SS-Pionier-Kaserne, de sa création jusqu’à la fin de la guerre, rend bien compte des conditions de vie dans les camps de concentration en général ; un taux croissant de déportés étrangers plus jeunes s’oppose à la majorité du début de déportés allemands souvent en détention depuis déjà de longues années (5).Dès le 15 octobre 1942 onze malades furent renvoyés dans le camp principal de Flossenbürg. Environ 30 déportés furent reconduits à Flossenbürg jusqu’au début de l’année 1943 sans raisons connues. Au cours de l’année 1943, en général par convois collectifs de quatre à quinze déportés, arrivèrent à Dresde surtout des Polonais et des Russes, là encore majoritairement des ouvriers spécialisés du bâtiment ou appartenant à d’autres professions importantes pour l’infrastructure du kommando comme des bouchers, des boulangers ou un dentiste. Le 23 décembre 1943 il y avait au total 198 déportés dans le kommando SS-Kaserne, dont 95 Allemands, 37 Russes, 21 Polonais, 19 Slovènes, 15 Italiens, 9 Tchèques ainsi qu’un Serbe et un Belge. Sur les 198 déportés, 117 étaient des « déportés en détention préventive » donc politiques, plus 69 « en préventive » et douze « asociaux ».

Le 28 février 1945 sont encore mentionnés 121 déportés dans le kommando de la SS-Pionier-Kaserne, soit 55 Polonais et 29 Allemands, 10 Tchèques et 10 Français, 9 Russes, quelques Belges, Bulgares, Italiens et Yougoslaves (6). Le dernier rapport d’effectif du camp du 13 avril 1945 donne le chiffre de 119 déportés. Quelques tentatives d’évasion sont mentionnées. Ainsi en octobre 1944, deux déportés allemands réussirent à s’évader, une autre tentative s’acheva tragiquement.

Les déportés étaient hébergés dans l’enceinte de la caserne dans trois grands garages, dont l’un servait de douches. Ces bâtiments étaient surveillés la nuit par environ cinq membres du SS-Pionierbataillon, qui étaient la plupart du temps des membres de la Waffen-SS, qui avaient été blessés au combat. La nourriture des déportés, décrite en gros comme meilleure que celle du camp principal, était donnée par la SS-Kaserne, tout comme un médecin SS en cas de besoin. Alors que les conditions de vie furent décrites comme quasiment « paradisiaques » trente ans plus tard par les témoins presque tous allemands lors des enquêtes de l’après-guerre du bureau central de l’administration judiciaire régionale, plusieurs témoins, dans un précédent procès contre le deuxième chef de camp Kurt Markgraf, parlèrent de mauvais traitements répétés avec une matraque, de non-assistance ayant entraîné la mort ainsi que la répartition de nourriture entre les kapos qui travaillaient aux cuisines et la SS (7).D’après les témoignages de trois à sept déportés moururent dans le kommando de la SS-Pionier-Kaserne. Le suicide d’un déporté allemand en mai 1944 est également mentionné tout comme le manque de soins apportés à un Slovène qui, en octobre 1942, s’était évadé ; au bout de trois jours un chasseur avait tiré sur lui à Radebeul et il avait été ramené à la caserne, où il mourut de ses blessures. Alors que le chef de kommando alors responsable Josef Schmatz et son représentant Markgraf (tous deux SS-Oberscharführer) sont dépeints comme brutaux, leur successeur SS-Oberscharführer Wilhelm Hartmann était aimé de tous. Il fut chef de kommando jusqu’ en février 1944 à Dresde, plus tard à Seifhennersdorf, où 30 déportés de Dresde durent travailler pendant un temps à la construction d’un hôpital SS.

Pour « complicité d’évasion » dans ce kommando, il fut arrêté trois mois à Flossenbürg. Son successeur fut le SS-Oberscharführer Ernst Scheithauer. La dissolution du kommando eut lieu le 15 avril 1945. La route primitivement prévue le long de l’Elbe en amont d’Aussig (Usti nad Labem), sur laquelle un convoi commun devait être formé avec des déportés d’autres kommandos, était bloquée en raison du front qui se rapprochait. C’est pour cette raison que les déportés furent envoyés par Dippoldiswalde vers Schmiedeberg, où la direction des travaux de la Waffen-SS avait installé une base d’évacuation. De nombreux déportés s’évadèrent en chemin, d’après différentes informations, 60 prisonniers d’un coup, sans que les gardiens ne soient intervenus. D’après d’autres dépositions, le directeur de la direction des chantiers aurait enquêté et 30 déportés auraient été exécutés. On ne sait rien de plus précis sur la libération des derniers déportés.

Les enquêtes du parquet contre Kurt Markgraf se terminèrent en 1949 avec sa condamnation. Puis d’autres enquêtes de la même autorité contre d’autres membres de la SS et des kapos furent interrompues en octobre 1976 pour cause de prescription, très exactement en raison de la mort des prévenus. À l’emplacement de l’ancien camp annexe se trouve aujourd’hui un magasin pour le bâtiment.

1      http://www.dresdner-stadtteile.de/Nordwest/Trachenberge/Trachenberge – sozialeinrichtu.html; letzter Zugriff : 18.01.06.

2      Aussage Hans L., 13.8.1964, in : BArch Ludwigsburg, ZStL. IV 410 (F) AR-Z 177/75.

3      Schriftwechsel zwischen WVHA und Kommandantur Flossenbürg, 23.et 27.3 1943, in: BArch Berlin, NS 4/FL 354, Bd. 1.

4    Schreiben des Dresdner Kommandoführers Markgraf, 24.2.1944 mit handschriftlichen Bemerkungen der Kommandantur, in: ITS, Historisches Archiv, Flossenbürg-Sammelakt 10, Bl. 15 (Kopie in: AGFI).

5    Überstellungen von Flossenbürg und Rücküberstellungen nach Flossenbürg, in: CEGESOMA, Mikrofilm 14368.

6      BArch Berlin, Bestand ehem. ZStA, Dok/K 183/11.

7      Anklageschrift gegen Kurt Markgraf, 13.12.1950, in: Staatsanwaltschaft Hamburg, Aktenzeichen 14 Js 185/49; Markgraf wurde in diesem Verfahren zu sieben Monaten verurteilt, in: BArch Ludwigsburg, ZStL. IV 410 (F) AR-Z 177/75.

Littérature

Hans Brenner, KZ-Zwangsarbeit während der NS-Zeit im Dresdner Raum, in: 4. Kolloquium zur dreibändigen Dresdner Stadtgeschichte 2006 vom 18.März 2000, hrsg. von der Landeshauptstadt Dresden, S. 53 – 62.

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.89, 90, 91, 92.

Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 13/06/2015.

DRESDEN  –  Universelle

L’usine de construction mécanique J.G.Müller & Co créée en 1898 était l’une des entreprises traditionnelles de Dresde dans l’industrie du tabac et produisait des machines à fabriquer des cigarettes. Durant la guerre l’Universelle devint, tout comme bien d’autres entreprises de l’industrie du tabac, une usine d’armement qui montait entre autres des projecteurs, des pièces de moteurs d’avions et de torpilleurs, mais aussi des appareils directionnels et des radios radiogoniomètres, dont les pièces détachées arrivaient d’entreprises spécialisées. L’entreprise exécutait entre autres de grosses commandes pour les usines Junkers. C’est pourquoi beaucoup de travailleurs étrangers furent employés sur les lieux de production ; il y eut le jusqu’à 3000 hommes dans les différents camps de travail obligatoire, et surtout à Dresde (1).

Le 9 octobre 1944, Zeiss Ikon s’installa dans le camp extérieur, 14 Florastrasse dans la vieille ville de Dresde, ainsi que dans celui de l’usine Goehle. C’est là qu’arrivèrent les premières femmes déportées en provenance du camp de concentration de Ravensbrück. L’ensemble des bâtiments se composait à l’origine de deux entrepôts de tabac brut et de différentes annexes construits entre 1883 et 1904 par la SA Jasmatzi et loués par l’Universelle spécialement pour la production d’armement.

Le 9 octobre 1944, 500 femmes furent transférées de Ravensbrück au Kommando de l’Universelle. En plus des nombreuses détenues allemandes « asociales », des lettones, des russes, des serbes et des tchèques. Un autre convoi de 200 femmes arriva de Ravensbrück le 19 janvier 1945 à Dresde, parmi elles beaucoup de détenues politiques et des « tziganes ». Quelques transferts arrivèrent de Neurohlau à Dresde ; des renvois de une à cinq femmes dans le camp d’origine Flossenbürg eurent lieu en décembre 1944 et en Janvier et Février 1945. Pour les détenues retransférées, il s’agissait d’une part « d’asociales » allemandes et de « détenues protégées » qui furent remises en liberté ou obtinrent un congé et d’autre part de deux femmes russes qui furent déplacées à Flossenbürg en vue d’un « traitement d’exception », c’est-à-dire pour être exécutées (2).

Les femmes devaient, par équipes, construire ou contrôler des régulateurs pour moteurs d’avions (3). Les exigences de la Kommandantur de Flossenbürg expliquent l’ampleur de la mobilisation (pratiquement constante) du travail obligatoire. Le 9 octobre 1944, premier jour de travail, furent enregistrées 485 ouvrières, les chiffres oscillèrent jusqu’à la fin de l’année entre eux 462 et 492 femmes. Toutes les détenues devaient travailler du lundi au samedi ; le dimanche de 15 à 45 d’entre étaient obligées de travailler (4).

Le bureau central de Ludwigsburg a fourni des appréciations très variées sur l’hébergement, la façon d’être traitées par les gardes SS et le personnel civil, ainsi que sur la nourriture. La plupart des femmes interrogées étaient des détenues allemandes ou autrichiennes, pour qui la nourriture était insuffisante mais le reste en général supportable. Des « tziganes » allemandes et des femmes témoins de Jéhovah estiment que le camp extérieur de l’Universelle de Dresde était mieux que d’autres lieux de souffrances. La plupart des femmes étaient logées dans un bâtiment de l’usine de la Florastrasse dans les deux étages supérieurs et devaient travailler dans la cave et au rez-de-chaussée. Une partie des femmes logeaient dans un baraquement situé sur le terrain de l’usine, elles travaillaient – tout comme celles logées dans l’usine – dans un atelier dans la Zwickauerstrasse (5). La plupart des déclarations parle de mauvais traitements et de punitions infligés par les gardiennes SS, mais jamais d’homicides de détenues par le personnel de garde.

Des SS de Flossenbürg furent détachés à Dresde pour surveiller le camp extérieur qui n’était pas protégé par une clôture. D’après les déclarations de l’ancienne surveillante Margot M. des travailleuses de l’Universelle durent prendre part à la formation de « chef de groupe de travail » ; la formation de quatre semaines eut lieu en août 1944 dans le camp extérieur de Holleischen. Parmi les gardiennes en chef en activité au Kommando de l’Universelle sévissait Charlotte Hanakam, décrite comme brutale, et à partir de fin novembre 1944 Ida Guhl, qui avait exercé auparavant aux Kommando de Dresde-Reick. Charlotte Hanakam et Margot Mehnert furent condamnées en Février 1946 par la cour d’assises de Dresde à cinq ans et quatre mois de réclusion (6). L’enquête révéla que le SS chef de groupe,

Erich Gerhard von Berg, accusé par le bureau central de l’administration judiciaire du Land à Ludwigsburg était chef du Kommando du camp extérieur de Dresde (Bernsdorf) et qu’il devait, d’après ses propres déclarations, contrôler le ravitaillement des détenues et faire les comptes avec les entreprises y compris pour les autres Kommandos de Dresde. C’est ainsi qu’il signa une plainte contre une gardienne en tant que chef de Kommando du camp extérieur de Dresde (l’Universelle)

C’est également de façon concordante que les femmes parlent des bombardements qui détruisirent presque entièrement l’usine et les bunkers de la Florastrasse lors d’une grande attaque aérienne sur Dresde le 14 février 1945 et tuèrent la plupart des femmes. D’après des témoignages, les survivantes étaient entre 9 et 150. On ne peut pas donner de chiffres plus précis des victimes ; dans les livres de matricules de Flossenbürg aucune des femmes n’est mentionnée décédée durant la période en question, ce qui ne correspond pas avec certitude la réalité. Une classification propre aux firmes des membres adhérents du 26 mars 1945 fait état pour ce jour de 685 détenues qui, à la même date, sont déclarées « libérées ». Ces données reflètent, tout comme les 679 femmes indiquées dans le dernier état des forces du 13 avril 1945 plutôt une liquidation progressive du camp dans l’optique des entreprises et de la Kommandantur que la réalité.

D’après un témoignage, le chaos qui suivit l’attaque aérienne permit non pas à peu de détenues mais à 150 de prendre la fuite (7).

Quatre femmes furent reprises et transférées au camp extérieur de Freiberg, mais elles purent tromper un vigile et s’enfuir. L’ancienne détenue Elise D. raconta que, profitant de la confusion générale, elle avait pu fuir avec cinq autres femmes allemandes, parce que des camions arrivés tout exprès devaient regrouper des travailleurs étrangers, mais seulement russes et polonais. Elles se présentèrent au commissariat de police à Ottendorf et des SS les conduisirent au camp de Radeberg. C’est là qu’elles furent libérées en mars 1945 (8). Après l’attaque aérienne, quelques femmes trouvèrent refuge d’abord dans la banlieue de Dresde chez des ouvrières qui les nourrirent et leur donnèrent des vêtements (9). Plusieurs femmes furent blessées au cours de l’attaque et furent prises en charge plus tard par les hôpitaux de Dresde et des environs. Malgré des dégâts matériels considérables, les femmes qui se trouvaient dans la Zwickauerstrasse lors de l’attaque, restèrent indemnes dans l’abri anti aérien. Moins de 100 – 63 d’après une déclaration – 84 d’après d’autres informations – furent conduites par la vallée de L’Elbe vers le sud au camp extérieur de Mockethal – Zatzschke (10).

Il semblerait que quelques femmes y furent abattues. Quelques semaines plus tard, la gardienne SS voulut envoyer les femmes à Pirna ; la marche fut cependant mitraillée  

L’usine de fabrication de machines, l’Universelle, continua après la guerre sous le nom de VEB Tabakuni, mais le bâtiment du 14 Florastrasse n’existe plus. Le parquet de Würzburg cessa ses enquêtes en juin 1978.

1   VEB Tabakuni Dresden, Betriebschronik-Faktenmaterial,S.1, in : Sächs.HStA Dresden, 11683, Universelle – Werke J.C. Müller &      Co. Dresden,Nr.35.

2   Rücküberstellungen von Aussenlagern nach Flossenbürg, in : CEGESOMA, Mikrofilm14368

3   Ausage Josefa A;,29.6.1967, in : BArch Ludwigsburg, ZStl.IV 410 AR-Z 101/76.

4   Monatliche Forderungsnachweise der Kommandantur Flossenbürg Abt.( Arbeitseinsatz) an die Universelle Maschinenfafrik J.G. Müller & Co., Dresden für Oktober bis Dezember 1944, in : BArch Berlin, 4/Fl 393, Bd.2.

5   Einstellungsbescheid der Staatsanwaltschaft Würzburg vom 15.6.1968, in : BArch Ludwigsburg, ZStl.IV 410AR-Z 101/76.

6   Mitteilung se Generalstaatsanwalts im Lande Sachsen an den Betriebsrat der Universelle, 25.2.1947, in Sächs.HStA Dresden, 11683, Universelle – Werke J.C. Müller & Co. Dresden,Nr.35.

7   Aussage von Cecilia L., 9.10.1970 in : BArch Ludwigsburg, ZStl.IV 410 AR-Z 101/76.

8   Aussage Elise D., 28.10.1976, in : ebenda.

9   Kopie einer entsprechenden handschriftlichen, undatierten Erklärung von Marianne L., «  Angestellte im KZ – Lager Florastr. », in : enbenda.

10 Aussage Frieda B., 5.2 .1970, in : ebenda.

Littérature

Rita Sprengel, Der rote Faden, Lebenserinnerungen, Ostpreussen, Weimarer Republik, Ravensbrück, DDR, Die Wende, Berlin 1994.

Hans Brenner, KZ-Zwangsarbeit während der NS-Zeit im Dresdner Raum, in : 4. Kolloquium zur dreibändigen Dresdner Stadtgeschichte 2006 vom 18.März 2000, hrsg. von der Landeshauptstadt Dresden, S.53-62

Ulrich Fritz

Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.92, 93, 94,95

Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 06 décembre 2012.

48-Historique-du-Kommando-de-Brezany-Jungfern-Breschan

K.29-Pottenstein

A l’origine, Rabstein situé dans les Sudètes près de Böhmisch-Kamnitz (Ceska Kamenice), ne comprenait que trois filatures de la firme Franz Preidl, localisées dans une étroite vallée rocheuse. Le 1er octobre 1942, ces usines furent montrées à la firme de Brême SARL Weser Constructions d’avions. Cette entreprise déplaça son unité de finition de pièces d’avion vers Rabstein, et jusqu’à la fin de la guerre auraient réalisés l’assemblage d’hélicoptères. Dans le cadre de son programme d’avions de chasse, l’état-major décida d’ériger à Rabstein une gigantesque unité de production souterraine, sous le nom de code de « Zechstein » (Pierre de mine ou pierre dure). Pour mener à bien ce projet de construction, des centaines de travailleurs forcés et de prisonniers de guerre furent transférés là pour le compte de plusieurs firmes de construction, dans le cadre de l’organisation Todt.

A l’été 1944, sont arrivés aussi ici les premiers déportés, comme force de démarrage. La création d’un camp de concentration à Rabstein, fut selon toute vraisemblance, ordonnée directement par l’état-major de l’aviation, et le camp fut installé comme kommando extérieur de Flossenbürg. Le camp a été, entre juin et août 1944, érigé à proximité immédiate des baraques qui existaient déjà pour les travailleurs civils -ou plutôt travailleurs forcés-, et il se composait de trois baraques de logement (pour environ 480 détenus), d’une cuisine et d’une baraque pour les malades. L’emplacement fut entouré de double fil de fer barbelé électrifié, et surveillé par trois miradors. En dehors de la surface clôturée, il y avait une baraque de logement pour les SS, et une salle de garde.

Le capitaine SS Oskar Jung a été nommé comme commandant du camp. Il a été fusillé en 1945 à Böhmisch-Kamnitz. Son adjoint était le sergent SS Richard Artur Junge, qui est mort au camp de prisonniers de Bad Mergentheim. L’équipe de surveillance se composait de 67 SS. Une grande part d’entre eux n’étaient pas de nationalité allemande, mais, semble-t-il, pour un tiers du kommando de surveillance, des Roumains, des Ukrainiens, des Croates, des Lituaniens et autres nationalités.

Le 28 août 1944, avant la construction du camp par des travailleurs forcés, est arrivé un premier transport de 400 hommes en provenance du camp de Dachau, suivi jusqu’au 3 septembre 1944 de 250 autres détenus. Jusqu’à la fin de la guerre, d’autres arrivées ont suivi, de personnes isolées, ou de petits groupes entre Rabstein et Flossenbürg, mais n’ayant qu’une faible incidence sur le nombre des détenus variant entre 630 et 690. Par la suite, les plus importants transports en provenance de Flossenbürg, l’ont été pour remplacer des détenus morts ou mourants.

Les détenus les plus nombreux étaient des « politiques », qui, numériquement, constituaient le deuxième plus grand groupe de « criminels professionnels ». Par la suite, il y eut à Rabstein un petit groupe d’homosexuels, et de prisonniers de guerre soviétiques. A la date du 28 février 1945, on pouvait dénombrer : 173 Allemands, 10 Belges, 54 Français, 10 Italiens, 1 Juif, 65 Yougoslaves, 4 Croates, 1 Lituanien, 71 Polonais, 193 Russes, 1 Suisse, 32 Tchèques, 16 Hollandais, 3 Apatrides, soit en tout 634 détenus pour Rabstein. Cet effectif resta à peu près constant.

Chez les détenus Allemands, il y avait pour une grande part des « criminels », qui dans l’organisation du camp étaient établis « kapos », et jouissaient d’une confiance particulière de la part de l’équipe de garde SS. C’est ainsi qu’ils étaient envoyés faire des achats dans la ville voisine de Böhmisch-Kamnitz. Les détenus étaient, chaque jour, répartis en kommandos, suivant les besoins des différentes firmes qui participaient à la construction de l’usine d’aviation. La plupart des détenus travaillaient en équipes de 12 heures par jour à la construction de galeries de mines, de canalisations enterrées, de chargements de matériels pour construire un petit chemin de fer de chantier. Une petite partie des détenus travaillait directement à la production d’avions.

Le ravitaillement était en dégoûtante contradiction avec les exigences. Les détenus avaient, tôt le matin, du café noir, à midi et le soir une gamelle d’une légère soupe de navets, et 300 grammes de pain. Une fois par semaine, il y avait un petit morceau de saucisson. Pendant un temps limité, il y eut un supplément de nourriture pour ceux qui avaient un travail dur en galerie. L’habillement était lui aussi insuffisant. Les détenus n’avaient qu’un sous-vêtement léger, et une tenue rayée de camp de concentration, qu’ils ne pouvaient jamais laver car il n’y avait pas de laverie dans le camp. A cause des durs travaux, beaucoup de détenus avaient des vêtements et des galoches hors d’usage, à tel point que beaucoup, pendant l’hiver 1944-1945, allaient travailler partiellement vêtus de sacs de ciment.

Le commandant remplaçant Junge était particulièrement brutal. Par exemple, on peut mettre à son compte la mort du paysan tchèque Josef Tichy, qui s’était endormi d’épuisement sur son lieu de travail, n’était pas paru à l’appel, ce pourquoi il fut battu à mort. Il y eut aussi quelques fusillades pour tentatives d’évasion. Plusieurs mises à mort, et on peut en fournir la preuve, sont à mettre au compte des détenus employés (kapos), qui par cupidité ou sadisme, ont battu à mort leurs camarades détenus.
56 cadavres venant du kommando de Rabstein furent incinérés au crématorium d’Aussig-Schreckenstein. Le nombre total des victimes est estimé de 80 à 100.

Début février 1945, une épidémie de typhus fit 40 victimes dans le camp. Le médecin affecté au camp, le Docteur Vater, de Böhmisch-Kamnitz, prit, malgré les protestations du commandant Jung, des mesures de quarantaine. Neuf parmi les malades les plus graves, furent transférés à l’hôpital de Tetschen (Decin). Trois sont morts, quatre se sont enfuis de l’hôpital. Pendant l’épidémie, la situation était déjà si critique que la direction du camp somma les parents des détenus d’envoyer des médicaments. On accepta aussi les colis de nourriture et de vêtements. Tout au début de l’épidémie, la direction des travaux décida d’améliorer les conditions d’hygiène qui étaient catastrophiques, et de construire une station d’épouillage.

Comme les lieux de travail se trouvaient souvent loin du camp et dans des terrains à l’écart, quelques détenus réussirent à s’enfuir. Par les relations de travail permanentes entre les travailleurs forcés et quelques contremaîtres allemands bien disposés, des lettres ont pu sortir du camp en fraude. A l’occasion, des détenus ont aussi obtenu du ravitaillement par d’autres travailleurs.

L’atelier d’aviation de Rabstein a fonctionné à plein jusqu’au soir du 7 mai 1945. Le 8 mai au matin, un jour avant l’arrivée de l’armée polonaise, l’évacuation du camp a été ordonnée. Les détenus devaient se rendre aux Américains. Ne sont plus restés au camp, que quelques malades graves, les autres, sous la surveillance des SS et de kapos armés, se mettant en marche en direction de Wernstadt (Vernerice), où ils passèrent la nuit dans une grange. Le lendemain, les gardes s’étaient enfuis, et les détenus sont partis, en petits groupes, dans toutes les directions.

Après la fin de la guerre, le camp a été pris en charge par les militaires tchèques, et à partir de juillet 1945, il a continué à fonctionner comme camp d’internement. D’abord pour incarcérer des SS et des membres du parti nazi en attente de jugement, puis pour des civils allemands des environs. Le camp a servi plus tard pour le regroupement de la population allemande établie de force dans les Sudètes ; il a été fermé en 1946, puis désaffecté. Jusqu’à aujourd’hui, il n’y a plus sur l’emplacement du camp, que des ruines, et un petit monument aux victimes du temps de guerre. Il y a eu un petit musée dans les restes de l’ancienne salle de garde. Ce musée, après les changements de 1990, a été saccagé et jamais remis en état. Depuis 2002, il y a un petit musée privé dans une des galeries de fabrication d’avions. Les recherches faites en 1976 par les services du Département de Justice à Ludwigsburg, sont restées vaines.

K.51-Würzburg