Historique des Kommando de Dresden – K 4
Dresden – Behelfsheim
L’existence de ce camp extérieur n’est connue que par une liste de transfert du camp principal de Flossenbürg « vers le camp de travail de Dresden Behelfsheim, le 13 avril 1945 ».1. En réalité elle est datée du 12 avril 1945.Le camp extérieur de Dresden (Behelfsheim) est ainsi le dernier camp extérieur de Flossenbürg – peu après le transfert d’un peu plus de 100 déportés le camp principal de Flossenbürg fut évacué, la plupart des déportés furent entraînés dans les marches de la mort en direction du sud.
Alors que le titre de la liste indique 105 déportés, seuls 103 noms sont notés. En plus de six citoyens allemands, parmi lesquels quelques –uns au moins devaient tenir le rôle de Kapo, sont mentionnés 43 Polonais (travailleurs civils, détenus en préventive ainsi que 18 Juifs), 30 Russes (travailleurs civils, prisonniers de guerre et un Juif) sept Tchèques ainsi que deux Croates, deux Juifs hongrois, deux Néerlandais, un Yougoslave, un Slovène et un Italien ; parmi eux relativement beaucoup de déportés « d’un certain âge » (il n’y avait que 23 déportés nés entre 1897 et 1910). Il y avait beaucoup d’ouvriers non spécialisés dans ce transport, mais aussi pour moitié des artisans, tels que serruriers, fraiseurs, électriciens ou menuisiers. Comme c’était l’usage sur beaucoup de listes de transport, l’état général est, là aussi, précisé sous forme de note ; pour la plupart il fut évalué par le médecin du camp responsable par -2- (apte au travail).
En comparant avec les notifications des registres de matricules de Flossenbürg, il est évident que beaucoup de déportés envoyés dans ce convoi devaient se trouver dans un état physique extrêmement mauvais. Pour certains déportés les notes n’indiquent pas superficiellement les maladies ou quelque chose de tel : Ainsi parmi ceux qui ont été envoyés il y a trois Juifs polonais, qui, en août 1944, arrivèrent à Flossenbürg en provenance du camp de concentration de Plaszow. Peu de temps avant d’être envoyés à Dresde, beaucoup d’entre eux étaient cependant retournés à Flossenbürg, arrivant des camps extérieurs, dans lesquels des maladies sévissaient et faisaient de nombreuses victimes, comme à Ansbach et Zwickau. D’autres, qui d’après les registres de matricules arrivaient directement de Flossenbürg, ont la mention « K » pour Krankenrevier très exactement, suivie des numéros des blocks de quarantaine 22 et 23. Pour quelques déportés il n’y a absolument aucune mention sous les numéros matricules correspondants de la source principale ; la liste de transfert représente juste la seule preuve connue et nominale de leur destin.
On ne sait pas vraiment en quoi consistait le camp extérieur (Behelfsheim). En raison des évènements esquissés, c’est-à-dire de la période tardive du convoi, de l’état de santé vraissemblablement mauvais des déportés et de la moyenne d’âge relativement élevée, on pense qu’il a fallu éloigner les déportés malades du camp principal déjà surchargé. De plus ce convoi tardif s’ajoute à une série de transferts qui –sans doute pour la même raison- eurent lieu peu avant la dissolution du camp principal de Flossenbürg vers différents camps extérieurs, mais presque toujours en direction du sud.
1 Überstellungen von Flossenbürg in Aussenlager, in :CEGESOMA, Mikrofilm14368
Ulrich Fritz
Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p. 77, 78.
Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 25 avril 2014.
Dresden – Goehle–Werk
La formation du camp extérieur dans la Goehle-Werk s’inscrit dans la création à Dresden de plusieurs kommandos du camp de concentration de Flossenbürg importants pour l’armement. Après l’atelier de réparation de la Reichsbahn (12 septembre 1944) et juste avant le MIAG-Werk à Zschachwitz près de Dresden (13 octobre 1944), chacun avec des détenus masculins, furent érigés deux kommandos de femmes le 9 octobre 1944.
L’un dans le Goehle-Werk de Zeiss-Ikon AG, l’autre dans l’entreprise Universelle. Un autre vit le jour deux semaines plus tard dans l’usine Zeiss Ikon de Reick. La mobilisation tardive comparée des camps de concentration de détenus à Dresden repose, entre autre, sur une industrie en grande partie non compatible avec l’armement, qui pendant la guerre avait en grande partie cessé le travail et qui ainsi mettait à disposition des espaces pour des transferts d’entreprises hors de villes sans doute menacées de violents bombardements (1).
Le Goehle-Werk (également orthographié « Goehlewerk » dans de nombreux actes) au nord-ouest de Dresden (Riesaer Str.32) faisait partie de la Zeiss Ikon AG, qui résultait de la fusion de plusieurs firmes, entre autre les usines photographiques de Heinrich Ernemann et de Ica AG également de Dresden et sous la direction de la fondation Carl-Zeiss. Dans les quatre usines de Dresden de même qu’à Berlin et Stuttgart, Zeiss Ikon produisait depuis l’appareil photos Contax jusqu’au projecteur de films une vaste palette de matériels optiques et d’accessoires cinématographiques. Un changement de production conditionné par la guerre en matériel d’armement comme des instruments spéciaux pour la Luftwaffe eut lieu dans toutes les usines Zeiss-Ikon ; mais dès le début la Goehle-Werk fut planifiée pour être une usine d’armement pour la fabrication de munitions et construite en 1940/1941. Ceci ne se traduisait pas que par une architecture typique de la fin des années trente, qui devait faire résister aux bombes les bâtiments industriels en béton armé munis de toutes petites fenêtres et de cages d’escaliers renforcées, mais aussi par l’embauche massive au nom du travail obligatoire de travailleurs non qualifiés, plus exactement non spécialisés, surtout des femmes, comme par exemple les juives de Dresden et des travailleuses du travail obligatoire étrangères, et enfin de déportées du camp de concentration de Flossenbürg. Dans la Goehle-Werk on fabriqua entre autres des bombes à retardement, des obus incendiaires pour le 12,8 cm- Flak et le 8,8 cm –Flak, des détonateurs de bombes (2)Les productions répondaient à des ordres de très haute priorité et furent assumées en partie par le programme Flak du programme des avions de chasse – peut-être une condition pour l’affectation de déportés.
D’après un document du bureau des salaires de Zeiss Ikon, 200 « travailleuses de camp de concentration » furent attribuées, le 18 octobre 1944, à la Goehle-Werk, le 28 octobre 1944, 300 autres ; et on en espéra encore 200. Les femmes eurent non seulement des matricules réservés dans le registre des travailleurs de l’usine, mais aussi des cartes Hollerith de salaire, avec un cachet imprimé « travailleuse de camp de concentration » accompagné du numéro matricule de la déportée, à défaut de nom (3).
Dans un premier temps, la firme réglait d’autres éventualités comme la garde et la déduction de séjours à l’hôpital ainsi que la déclaration de tentatives d’évasion. Le jour de la première affectation de déportés fut indiqué – sûrement par erreur – comme étant le 18 octobre 1944. Pourtant le registre de comptabilité de la cuisine de Goehle-Werk mentionne en octobre 1944 pour « le camp de travail 453 » (c’est la désignation interne à l’usine pour les registres de comptes) des prélèvements et des débits « d’alimentation de déportés du 8 au 31 octobre 44 ».
Cette date est confirmée, tout comme les données chiffrées ultérieures du protocole, par les registres de matricules des déportés du camp de concentration de Flossenbürg.4. Il y est consigné un convoi de 200 femmes en provenance de Ravensbrück sur « Dresden Zeiss Ikon » en date du 9 octobre 1944 ; à part deux Françaises, le transfert ne concernait que des Russes et des Polonaises. On ignore d’après quels critères elles avaient été choisies. Pour le 24 octobre 1944, les registres de matricules font état d’un convoi de 300 femmes venant d’Auschwitz.
À l’exception de quelques déportées allemandes, italiennes et yougoslaves, il s’agissait encore de femmes russes et polonaises, pour la plupart déportées politiques ou de « travailleuses civiles ». Un dernier convoi de 197 femmes venant de Ravensbrück est prouvé le 14 décembre 1944 ; on y trouve, en plus des Russes et des Polonaises, de nombreuses déportées allemandes et françaises, auxquelles il faut ajouter quelques Luxembourgeoises, Italiennes, Tchèques et même une Égyptienne.
Tous les témoignages affirment que l’alimentation fournie par l’usine était très insuffisante. Une comparaison des dépenses de cuisine de l’usine pour le mois de décembre 1944 avec les justificatifs correspondants de fournitures traduit une ration d’environ une livre de pain par jour et par déporté, en supposant que les quantités décomptées aient bien été distribuées aux femmes.
On peut indirectement tirer des conclusions sur les conditions de vie extrêmement difficiles pour les femmes dans la Goehle-Werk. Ainsi dans les registres de matricules tout comme dans les rapports de la Kommandantur à Flossenbürg sont consignées continuellement des tentatives d’évasion, qui du moins après la grande attaque de février 1945 avaient des chances de réussir.5 Dès le 24 octobre 1944, deux Russes tentèrent de fuir, au moins l’une d’entre elles fut cependant reprise et envoyée le 6 décembre 1944 à Ravensbrück. Quelques autres tentatives isolées, la dernière le 5 avril 1945, expriment l’intensité de la douleur des femmes. L’arrivée de deux soignantes du kommando de Neurohlau en novembre 1944 fait aussi penser que la santé des femmes était déficiente. La mobilisation pour le travail des déportées ne joue pas un grand rôle dans leurs témoignages ; son ampleur se révèle dans les demandes du service d’embauche de la Kommandantur de Flossenbürg.6. A partir du 9 octobre 1944, on décompta 190 ouvrières non spécialisées, tandis qu’à partir du 30 octobre 1944, on en ajouta 492, et 679 à partir du 11 décembre 1944. En raison des attaques aériennes les 13 et 14 février 1945, aucune ou très peu de femmes travaillèrent à la journée entre les 14 et 20 février. La dernière répartition du travail du 13 avril 1945 fait mention d’un total de 684 déportées. Il y eut quelques transferts en provenance de Neurohlau, ainsi que des renvois de quelques femmes à Ravensbrück, et entre autres un transfert de cinq femmes au kommando de Chemnitz pour les Astra-Werke le 12 février 1945.7
La surveillance était assurée, d’après les témoignages des déportées, par des gardiennes (de la SS), qui étaient armées de matraques en caoutchouc et n’hésitaient pas à frapper.
Le 25 octobre 1944, la Kommandantur de Flossenbürg envoya à la gardienne en chef Gertrud Schäfer des autorisations pour 17 gardiennes. Un relevé non daté fait état de 22 gardiennes pour Goehle-Werk, qui toutes venaient d’un stage de formation à Hölleischen.8 Toutes les femmes étaient originaires de Dresden et des environs, ce qui laisse penser qu’elles avaient toutes déjà été employées chez Zeiss Ikon. La gardienne en chef à la Goehle-Werk fut jusqu’en février 1945 Gertrud Schäfer, lui succéda la gardienne de Hueber décrite par la plupart des déportées comme dure et cruelle. Les femmes étaient logées à l’usine, les postes de travail se trouvaient un ou deux étages plus bas.
Pendant les bombardements du 14 février 1945, les femmes étaient enfermées dans leur hébergement. Quelques-unes profitèrent du chaos qui suivit l’attaque pour fuir. La belle-sœur de l’une d’elles, qui avait réussi son évasion, fut rendue sourde d’une oreille à force de coups et retenue une semaine en détention dans le bunker.
Deux décès sont enregistrés pour le mois de novembre 1944, un autre plus tardif, « traitement spécial » d’une déportée russe au camp principal de Flossenbürg, en janvier 1945.
« L’évacuation » du camp eut lieu à la mi-avril 1945 par train et à pied le long de l’Elbe. Le but était Leitmeritz. Bien avant d’y arriver, les déportées furent libérées, beaucoup avaient fui.
Au « procès de la Goehle-Werk » en janvier 1949, dix accusés, parmi lesquels Nitsche, le directeur adjoint, ainsi que plusieurs contremaîtres et des gardiennes SS furent condamnés à une peine d’emprisonnement allant de un à huit ans. Le ministère public de Ludwigsburg clôtura ses enquêtes vingt ans plus tard et conclut qu’aucun homicide de déportée n’était prouvé. L’ancienne Goehle-Werk fut jusque dans les années qui suivirent la fin de la RDA le siège de l’édition saxonne et d’autres entreprises d’édition et d’impression ; après restauration, elle est aujourd’hui utilisée comme local industriel.
1 Alexander Fischer, Ideologie und Sachzwang, Kriegswirtschaft und – Ausländereinsatz – im südostsächsischen Elbtalgebiet, in: Sächsisches Staatsministerium des Innern (Hrsg.),Fremd – und Zwangsarbeiter in Sachsen 1939-1945, Halle/Saale 2002, S.12-26, hier : S.13 f.
2 Kriegsauftrag Kolben mit Uhrwerk SS 563-1- 5115, in: Sächs. HStA Dresden, 11722, Ernemann-Werke AG/ Zeiss Ikon AG Dresden, Nr 424.
3 Ebenda, Nr 319 Werksküchen.
4 NARA, RG 338, 290/13/22/3, 000-50-46, Box 537 (Mikrofilm-Kopie in : AGFI)
5 Fluchtmeldungen vom 29.10.1944 bzw. für den 3.3 und 7.3.1945 in: CEGESOMA, Mikrofilm 14368.
6 Forderungsnachweis für Oktober 1944, in: BArch Berlin, NS 4/FL 393, Bd. 2. Abgerechnet wurden nur die tatsächlich zur Arbeit eingesetzten Häftlinge.
7 Überstellungen, in: CEGESOMA, Mikrofilm 14368.
8 BArch Berlin, NS 4/FL 10.
Littérature
Victor Klemperer, “Ich will Zeugnis ablegen bis zum letzten” Tagebücher 1933 – 1945. Berlin 1995.
Henny Brenner,« Das Lied ist aus » – Ein jüdisches Schicksal in Dresden, Zürich/München 2001.
Hans Brenner, “KZ Zwangsarbeit während der NS-Zeit im Dresdner Raum”, in: 4. Kolloquium zur dreibändigen Dresdner Stadtgeschichte 2006 vom 18.März 2000, hrsg. von der Landeshauptstadt Dresden, S. 53 – 62.
Reinhardt Balzk, “ Zwangsarbeiter in Dresden” hrsg. von der PDS-Fraktion im Dresdner Stadtrat, September 2001 (http://www.pds-dresden.de/doku/zwangsarbeiter.pdf, 8 Seiten, letzter Zugriff 18.01.06)
Ulrich Fritz
Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.82, 83, 84, 85.
Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 3 décembre 2014.
Dresden – Reichsbahnausbesserungswerk
Le kommando de Dresden (Reichsbahnausbesserungswerk/RAW) sur la rive de la Weisseritz fut créée le 12 septembre 1944. À cette époque une nombreuse main d’œuvre étrangère était déjà embauchée dans la RAW de Dresde et dans d’autres entreprises de la Reichsbahndirektion (RBD), avant tout des « travailleurs de l’est » et des Belges, des prisonniers de guerre britanniques et des internés militaires italiens. En plus de ceux-ci, est mentionné dans les « informations internes à l’usine concernant les capacités en main d’œuvre des camps » un camp pour déportés de camp de concentration, pour lequel sont notés 300 déportés pour le 15 septembre, 299 pour le 15 octobre et 597 pour le 15 novembre 1944 (1).
Les 300 premiers déportés arrivaient de Varsovie – une partie d’entre eux avait participé à l’insurrection de Varsovie – et après un court emploi dans les usines Heinkel au titre du travail obligatoire au camp de concentration de Sachsenhausen, ils avaient été conduits à Dresden le 14 septembre 1944 (2). Mis à part un déporté allemand et un déporté français, les registres de matricules de Flossenbürg ne mentionnent dans ce convoi que des « travailleurs civils » polonais (3). Un deuxième groupe fut transféré du camp de concentration de Gross-Rosen à Dresden par un convoi le 25 octobre 1944. La grande majorité de ces 300 déportés était constituée de « déportés en détention préventive » et de travailleurs civils polonais et russes, auxquels s’ajoutaient quelques Tchèques, Lituaniens, Allemands, français et Croates. Des déportés politiques, des « asociaux » isolés et des tsiganes formaient une toute petite partie.
Les justificatifs de la kommandantur de Flossenbürg indiquent formellement le 15 septembre 1944 comme « début du kommando » (4).Dèsle 30 septembre 1944, un premier déporté mourut. Jusqu’à l’arrivée du deuxième convoi le 27 octobre, le nombre de déportés effectivement embauchés au titre du travail obligatoire passa de 300 à 281, ce qui renseigne sur l’aggravation des conditions de vie ; ces hommes devaient aussi travailler toute la moitié du dimanche. Jusqu’à la fin de l’année le nombre de déportés au travail passa de 586 maximum à environ 540 à la fin décembre 1944.
Les hommes devaient réparer des wagons endommagés de la RAW dans un secteur spécifiquement prévu pour « déportés de camp de concentration chargés de la réparation de wagons de marchandises » (5). Les déportés de Sachsenhausen, plus exactement de Gross-Rosen, devaient travailler en deux équipes de chacune douze heures ; d’après les dires de l’ancien déporté Zbigniew Kolakowski, ils se rencontraient pour la première fois, depuis que leur hébergement à Dresden avait été détruit lors des attaques aériennes sur Dresden (6).
D’après d’autres dépositions, les déportés étaient logés dans le même hangar à locomotives non chauffé, mais travaillaient à différents endroits. En fait les mentions dans les registres de matricules de Flossenbürg montrent des différences énormes entre les deux convois. Mais avant tout elles renseignent sur les conditions catastrophiques dans le kommando de la RAW. Visiblement, on craignait de la part des déportés en général des tentatives d’évasion dans le secteur de la Reichsbahn. En tout cas, le directeur chargé de l’unité décida immédiatement d’un signe distinctif pour reconnaître les déportés, à savoir un brassard sur le modèle des déportés embauchés dans la RAW de Jena (7).
Trois jours avant ce décret, le 25 octobre 1944, trois déportés « avaient été abattus lors d’une évasion ». D’après des témoignages postérieurs, les déportés essayaient de sortir du secteur bouclé du kommando, cachés sous les essieux des wagons réparés. Et d’après les registres de matricules au moins cinq hommes furent abattus en novembre et décembre 1944 ; on ne sait pas quelle fut l’issue des autres évasions. Le très mauvais approvisionnement, mais aussi les brutalités sur quelques déportés étaient responsables de ces actes de désespoir (8). Au total moururent 24 déportés du convoi de Sachsenhausen à Dresden et au moins 55 du convoi de Gross-Rosen.
Le responsable en était le chef de kommando SS-Hauptsturmführer Rudolf Becher de Falkenau, qui mourut en 1946, prisonnier de guerre en Union Soviétique. Nous n’avons pas d’informations précises sur l’importance de la garde, qui était logée dans les ateliers du bâtiment. Des listes non datées de livraison d’armes et de munitions mentionnent entre 25 et 32 membres de la SS de rang inférieur, parmi lesquels des Allemands de Hongrie et des Ukrainiens (9).
Visiblement le convoi en provenance de Gross-Rosen était particulièrement affecté par les bombardements sur Dresden les 13 et 14 février 1945, ce que révèlent les différents postes de travail des deux groupes de déportés. 32 décès sont répertoriés à la date du 20 février 1945 et 19 autres pour le 22 février.
Les 514 survivants furent transférés dès le 19 février par train, au camp principal de Flossenbürg (10). Au cours de ce transfert au moins 15 déportés s’évadèrent ; d’après des témoignages concordants ils s’échappèrent par un trou dans la cloison de wagon, tandis que la garde SS tirait sur le wagon. Nombreux sont les déportés transférés qui moururent peu de temps après à Flossenbürg. Les autres furent envoyés dans différents kommandos, où une partie d’entre eux dut à nouveau travailler pour la Reichsbahn, ou bien carrément dans des camps de la mort. Les survivants du convoi de Sachsenhausen allèrent pour la plupart à Ohrdruf, kommando du camp de concentration de Buchenwald, à Offenburg, kommando du camp de concentration de Natzweiler ainsi que dans la RAW de Regensburg. Les déportés du convoi de Gross-Rosen furent envoyés principalement à Leonberg, kommando du camp de concentration de Natzweiler, ainsi qu’à Ansbach, Kirchham et Pottenstein, kommandos de Flossenbürg.
Dans le registre des lieux de détention du service international de recherche, le 13 avril 1945 est la dernière date indiquée pour le kommando de la RAW de Dresden, date à laquelle le département du travail du camp principal de Flossenbürg mentionne encore quatre déportés pour ce kommando. La conclusion des enquêteurs de Ludwigsburg est la suivante : « Les anciens déportés entendus datent la période de la dissolution du camp annexe à la fin février 1945 ou quelques jours après le bombardement de Dresden. » (11). Il ne reste aujourd’hui presque rien de l’ancienne usine de réparation de la Reichsbahn. La grande salle. II fut démolie il y a quelques années, une stèle à la mémoire des déportés décédés fut retirée lors des projets de construction et elle se trouve aujourd’hui devant une habitation sur l’Emmerich-Ambros-Ufer.
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1 Sächs. HStA Dresden, 11698 A, RAW Dresden, Nr. 37.
2 Aussage Karol S., 3.7.1970, in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3032/66.
3 NARA, RG 338, 290/13/22/3, 000-50-46, Box 537 (Mikrofilm-Kopie in: AGFI).
4 Monatliche Forderungsnachweise der Kommandantur Flossenbürg (Abt. Arbeitseinsatz) an das Reichsbahnausbesserungswerk Dresden für Oktober bis Dezember 1944, in: BArch Berlin, NS 4/FL 393, Bd. 2.
5 Sächs. HStA Dresden, 11698 A, RAW Dresden, Nr. A 37, Bl. 51.
6 Mündliche Auskunft von Zbigniew Kolakowski am 23.7.2004.
7 Sächs. HStA Dresden, 11698 A, RAW Dresden, Nr. A 166.
8 Aussagen Teofil Marian K., 12.2.1976, und Eryk N. , 23.2.1976, in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 152/76.
9 BArch Berlin, NS 4/FL 428.
10 AVG, vorl. Signatur 2121, Lagerstärkemeldung vom 20.2.1945.
11 Schlussvermerk, 15.4.1976, in: BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3032/66.
Ulrich Fritz
Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.85, 86, 87, 88. Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 24/02/2015.
Dresden-Reick
L’usine Ica au 40 Mügelner Strasse à Reick, un quartier au sud-est de Dresde, était l’une des quatre usines de Dresde de la Zeiss Ikon AG et devint en octobre 1944 le lieu d’un camp extérieur comme la Goehle-Werk. Déjà avant la création du camp de concentration de nombreux étrangers, hommes et femmes pratiquement à égalité, travaillaient au nom du travail obligatoire dans l’usine Reick, comme d’ailleurs dans les autres implantations de Zeiss-Ikon ‘1). Les noms des femmes sont intégralement indiqués dans les registres de matricules de Flossenbürg, qui indiquent que le convoi du 24 octobre 1944 alla directement du camp de concentration d’Auschwitz à Dresde. À part une Allemande, une Yougoslave et une Italienne, il n’y eut que des Polonaises et des Russes au camp annexe de Reick. Pour la période d’octobre à décembre 1944, on réussit à comprendre le nombre des déportés grâce aux pièces justificatives exigées du département du travail de Flossenbürg. Il en résulte qu’à partir du 22 octobre, 200 femmes furent réclamées, un chiffre qui resta constant malgré quelques variations à la baisse. Au contraire de la Goehle-Werk quelques-unes des femmes de l’usine Reick devaient aussi travailler de temps en temps le dimanche.
Il n’existe de pas de témoignages précis sur le travail des déportés. Les informations données dans les dossiers d’enquêtes du bureau central des administrations judiciaires régionales concernant l’hébergement des déportés sont contradictoires, mais indiquent majoritairement que les femmes étaient hébergées dans les bâtiments de l’usine. Il n’est pas mentionné d’homicides volontaires dans l’usine de Reick, ce qui explique que le bureau central de Ludwigsburg ait arrêté les enquêtes dans les années 60 (2). Toutefois au moins un rapport de retour mentionne l’assassinat d’une déportée : le 23 décembre 1944, une « travailleuse civile » russe fut transférée à Flossenbürg, le rapport du bureau des écritures du camp de Flossenbürg porte la mention « SB [Sonderbehandlung] (traitement spécial) 3 .1.45 » ainsi qu’une croix. Les transferts de deux infirmières de détenues du camp annexe de Neurohlau à Dresden-Reick début février 1945 sont également prouvés ainsi que quelques retours du camp annexe de Reick à Flossenbürg er Bergen-Belsen. Le chef du kommando à l’usine Reick était le SS-Oberscharführer Olschewski, à qui succéda le SS-Unterscharführer Johann Heinz (3). Fin janvier 1945, les 194 détenus étaient gardés par 4 hommes de garde et 19 surveillantes (4).Quelques-unes des premières surveillantes à Reick avaient été envoyées de Zschopau, où également dans un camp annexe du camp de concentration de Flossenbürg, elles devaient surveiller des femmes déportées ; mais celles-ci n’étaient pas encore arrivées (5).Jusqu’à la fin février, le nombre des surveillantes tomba à douze ; elles gardaient 388 détenus avec huit hommes de garde.
Après l’attaque aérienne du 14 février 1945, les femmes furent mises à contribution pour les travaux de déblaiement. Le 25 février 1945, un autre grand convoi de 200 femmes arriva de Bergen-Belsen à « Dresden Zeiss Ikon » ou « Dresden Reik » (sic). Les femmes étaient majoritairement des Juives hongroises, mais il y avait aussi quelques Juives allemandes, françaises, grecques, italiennes et tchèques, ainsi que des « travailleuses civiles » russes, qui avaient été, en partie, déplacées d’Auschwitz à Bergen-Belsen. Peu de temps après leur arrivée une épidémie de typhus se déclara dans le camp ; elle fit de nombreuses victimes. Dans les dossiers du cimetière de Dresde qui datent de l’après-guerre, sont mentionnées 18 femmes décédées entre le 20 mars et le 7 avril ; elles furent, comme d’autres déportées, inhumées au Johannisfriedhof de Dresde, mais enregistrées par erreur comme étant des déportées du camp annexe de Zschachwitz (6). Dans les registres de matricules de Flossenbürg 23 décès sont mentionnés entre le 5 mars et le 8 avril 1945. C’étaient exclusivement des femmes apparemment très affaiblies du second convoi qui était resté très isolé. Une femme témoigne de 36 décès et précise qu’un SS-Oberscharführer de Hongrie avait fait venir dans le camp un médecin juif de sa ville d’origine pour s’occuper des malades (7). D’autres femmes parlent d’un nombre beaucoup plus élevé de victimes du typhus, sans précisions supplémentaires.
Quelques femmes mirent à profit la situation décrite comme chaotique pour s’enfuir, d’après les registres de matricules, huit femmes s’évadèrent dans la seule journée du 27 avril 1945 et une autre le 22 mars 1945. D’après le dernier un rapport sur l’effectif du 13 avril 1945, il y avait 362 détenues dans le camp annexe de Reick.
Dans les dossiers d’enquêtes, on trouve des renseignements extrêmement contradictoires sur la dissolution du camp et le sort réservé aux femmes. Les témoignages concordent pour dire que le camp fut évacué fin avril 1945, et que les femmes furent conduites vers la frontière tchèque (certaines parlent de la bourgade de Hellendorf), où elles furent libérées par les troupes soviétiques.
Après la guerre, l’industrie optique utilisa les bâtiments de l’entreprise et aujourd’hui, ils abritent un centre de formation. Rien ne rappelle l’ancien kommando.
1 Zwischen April 1942 und Dezember 1944 mussten im Werk Reick bis zu 671 Ausländer arbeiten. Meldung der beschäftigten Ausländer (einschl. Juden) und Kriegsgefangenen, in: Sächs. HStA Dresden, 11722, Ernemann – Werke AG/ Zeiss Ikon AG Dresden, Nr 205.
2 BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3016/66.
3 Schlussvermerk, in: ebenda.
4 Stärkemeldung der Wachmannschaften und Häftlinge der Arbeitslager im Dienstbereich des HSSPF des SS-Oberabschnitts-ELBE nach dem Stand vom 31.1.1945 und 28.2.1945, in: ITS Arolsen, Historisches Archiv, Flossenbürg-Sammelakt 10, BL. 54 und 70.
5 Für diesen Hinweis danke ich Pascal Cziborra, Lemgo.
6 Liste der Gräber der Widerstandskämpfer auf dem Johannisfriedhof, in : StA Dresden, 9.1.14. Nr 778.
7 Aussage Sara N., 23.7.1967, in : BArch Ludwigsburg, ZStL IV 410 AR 3016/66.
Littérature
Hans Brenner, KZ- Zwangsarbeit während der Nazi-Zeit im Dresdner Raum, in :4. Kolloquium zur dreibändigen Dresdner Stadtgeschichte 2006 vom 18. März 2000, hrsg. Von der Landeshauptstadt Dresden, S. 53-62.
Ulrich Fritz
Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.96, 97, 98.
Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 15/01/2015.
Dresden – SS-Pionier-Kaserne
Le kommando de la SS-Pionier-Kaserne fut le deuxième des kommandos du camp de concentration de Flossenbürg et le premier kommando installé à Dresde. Sur le terrain du « Hellerhof » fondé en 1894 dans le quartier de Trachenberge, sur lequel depuis 1934 une coopérative qui luttait contre la mortalité des nourrissons, avait élevé des ânes pour obtenir du lait pour les bébés (1), des déportés furent contraints durant plus de trois ans d’effectuer des travaux pour la direction SS de construction de Dresde, surtout pour construire des hébergements pour le SS-Pionier-Ersatzbataillon, mais aussi dans des lieux à l’extérieur de Dresde. Les cent premiers déportés arrivèrent du camp de concentration principal de Flossenbürg à Dresde en juin 1942. D’après les listes de transferts triées par métiers, il s’agissait presque exclusivement d’ouvriers spécialisés du bâtiment (maçons, couvreurs, charpentiers et ébénistes, plombiers, peintres, électriciens et serruriers). Après la dissolution du kommando de Stulln 99 autre déportés arrivèrent à Dresde à la mi-octobre 1942. Les premiers étaient majoritairement des « prisonniers allemands en détention préventive » et des « asociaux », souvent depuis déjà plusieurs années en camp de concentration, il y avait aussi à Dresde, mais ils étaient peu nombreux, des déportés polonais, russes et tchèques. L’arrivée de deux couvreurs venant du camp de concentration de Sachsenhausen à Dresde en août 1942 est le premier cas mentionné d’un transfert en provenance d’un camp principal dans le kommando d’un autre camp principal.
Les quelques 200 déportés durent d’abord construire un hôpital militaire dans la SS-Pionierkaserne. À partir d’octobre 1943 des détenus de Dresde avec d’autres consolidèrent le château de Neuhirschstein, situé sur l’Elbe à environ dix kilomètres en aval de Meissen, dans lequel, plus tard, la famille royale belge fut retenue prisonnière. De plus, ils furent employés à d’autres projets de construction de la direction des travaux SS, comme la construction d’un hôpital à Seifhennersdorf ; en règle générale ils étaient aussi mis à la disposition d’entreprises privées qui marchaient bien. D’après Hans L., un membre de la SS, qui, après une blessure, fut détaché à la direction des travaux à Dresde, la direction des travaux contrôlait entre autres la construction de camps de baraquements, la transformation d’écoles en hôpitaux et le déblaiement des dégâts causés par la guerre (2). Le règlement fut appliqué différemment que dans le cas de kommandos dans l’industrie d’armement.
C’est ainsi que le SS-Pionier-Ersatz-Bataillon était en charge des vivres pour les déportés, ainsi que de leur affectation (3).A partir d’avril 1944, il ne fallait plus rembourser les coûts de main d’œuvre figurant dans les justificatifs. D’autre part les kommandos externes devaient aussi être approvisionnés sur le contingent de vivres, ce qui de toute façon aggravait le manque déjà existant. Le surplus de consommation du kommando de Neuhirschstein « suite au surcroît de travail et au travail de nuit » fut par exemple à nouveau économisé sur les livraisons à Dresde. La demande des déportés de Dresde d’utiliser leurs comptes bloqués pour l’achat de pommes de terre fut rejetée (4).
La composition quantitative et qualitative des déportés dans le kommando de la SS-Pionier-Kaserne, de sa création jusqu’à la fin de la guerre, rend bien compte des conditions de vie dans les camps de concentration en général ; un taux croissant de déportés étrangers plus jeunes s’oppose à la majorité du début de déportés allemands souvent en détention depuis déjà de longues années (5).Dès le 15 octobre 1942 onze malades furent renvoyés dans le camp principal de Flossenbürg. Environ 30 déportés furent reconduits à Flossenbürg jusqu’au début de l’année 1943 sans raisons connues. Au cours de l’année 1943, en général par convois collectifs de quatre à quinze déportés, arrivèrent à Dresde surtout des Polonais et des Russes, là encore majoritairement des ouvriers spécialisés du bâtiment ou appartenant à d’autres professions importantes pour l’infrastructure du kommando comme des bouchers, des boulangers ou un dentiste. Le 23 décembre 1943 il y avait au total 198 déportés dans le kommando SS-Kaserne, dont 95 Allemands, 37 Russes, 21 Polonais, 19 Slovènes, 15 Italiens, 9 Tchèques ainsi qu’un Serbe et un Belge. Sur les 198 déportés, 117 étaient des « déportés en détention préventive » donc politiques, plus 69 « en préventive » et douze « asociaux ».
Le 28 février 1945 sont encore mentionnés 121 déportés dans le kommando de la SS-Pionier-Kaserne, soit 55 Polonais et 29 Allemands, 10 Tchèques et 10 Français, 9 Russes, quelques Belges, Bulgares, Italiens et Yougoslaves (6). Le dernier rapport d’effectif du camp du 13 avril 1945 donne le chiffre de 119 déportés. Quelques tentatives d’évasion sont mentionnées. Ainsi en octobre 1944, deux déportés allemands réussirent à s’évader, une autre tentative s’acheva tragiquement.
Les déportés étaient hébergés dans l’enceinte de la caserne dans trois grands garages, dont l’un servait de douches. Ces bâtiments étaient surveillés la nuit par environ cinq membres du SS-Pionierbataillon, qui étaient la plupart du temps des membres de la Waffen-SS, qui avaient été blessés au combat. La nourriture des déportés, décrite en gros comme meilleure que celle du camp principal, était donnée par la SS-Kaserne, tout comme un médecin SS en cas de besoin. Alors que les conditions de vie furent décrites comme quasiment « paradisiaques » trente ans plus tard par les témoins presque tous allemands lors des enquêtes de l’après-guerre du bureau central de l’administration judiciaire régionale, plusieurs témoins, dans un précédent procès contre le deuxième chef de camp Kurt Markgraf, parlèrent de mauvais traitements répétés avec une matraque, de non-assistance ayant entraîné la mort ainsi que la répartition de nourriture entre les kapos qui travaillaient aux cuisines et la SS (7).D’après les témoignages de trois à sept déportés moururent dans le kommando de la SS-Pionier-Kaserne. Le suicide d’un déporté allemand en mai 1944 est également mentionné tout comme le manque de soins apportés à un Slovène qui, en octobre 1942, s’était évadé ; au bout de trois jours un chasseur avait tiré sur lui à Radebeul et il avait été ramené à la caserne, où il mourut de ses blessures. Alors que le chef de kommando alors responsable Josef Schmatz et son représentant Markgraf (tous deux SS-Oberscharführer) sont dépeints comme brutaux, leur successeur SS-Oberscharführer Wilhelm Hartmann était aimé de tous. Il fut chef de kommando jusqu’ en février 1944 à Dresde, plus tard à Seifhennersdorf, où 30 déportés de Dresde durent travailler pendant un temps à la construction d’un hôpital SS.
Pour « complicité d’évasion » dans ce kommando, il fut arrêté trois mois à Flossenbürg. Son successeur fut le SS-Oberscharführer Ernst Scheithauer. La dissolution du kommando eut lieu le 15 avril 1945. La route primitivement prévue le long de l’Elbe en amont d’Aussig (Usti nad Labem), sur laquelle un convoi commun devait être formé avec des déportés d’autres kommandos, était bloquée en raison du front qui se rapprochait. C’est pour cette raison que les déportés furent envoyés par Dippoldiswalde vers Schmiedeberg, où la direction des travaux de la Waffen-SS avait installé une base d’évacuation. De nombreux déportés s’évadèrent en chemin, d’après différentes informations, 60 prisonniers d’un coup, sans que les gardiens ne soient intervenus. D’après d’autres dépositions, le directeur de la direction des chantiers aurait enquêté et 30 déportés auraient été exécutés. On ne sait rien de plus précis sur la libération des derniers déportés.
Les enquêtes du parquet contre Kurt Markgraf se terminèrent en 1949 avec sa condamnation. Puis d’autres enquêtes de la même autorité contre d’autres membres de la SS et des kapos furent interrompues en octobre 1976 pour cause de prescription, très exactement en raison de la mort des prévenus. À l’emplacement de l’ancien camp annexe se trouve aujourd’hui un magasin pour le bâtiment.
1 http://www.dresdner-stadtteile.de/Nordwest/Trachenberge/Trachenberge – sozialeinrichtu.html; letzter Zugriff : 18.01.06.
2 Aussage Hans L., 13.8.1964, in : BArch Ludwigsburg, ZStL. IV 410 (F) AR-Z 177/75.
3 Schriftwechsel zwischen WVHA und Kommandantur Flossenbürg, 23.et 27.3 1943, in: BArch Berlin, NS 4/FL 354, Bd. 1.
4 Schreiben des Dresdner Kommandoführers Markgraf, 24.2.1944 mit handschriftlichen Bemerkungen der Kommandantur, in: ITS, Historisches Archiv, Flossenbürg-Sammelakt 10, Bl. 15 (Kopie in: AGFI).
5 Überstellungen von Flossenbürg und Rücküberstellungen nach Flossenbürg, in: CEGESOMA, Mikrofilm 14368.
6 BArch Berlin, Bestand ehem. ZStA, Dok/K 183/11.
7 Anklageschrift gegen Kurt Markgraf, 13.12.1950, in: Staatsanwaltschaft Hamburg, Aktenzeichen 14 Js 185/49; Markgraf wurde in diesem Verfahren zu sieben Monaten verurteilt, in: BArch Ludwigsburg, ZStL. IV 410 (F) AR-Z 177/75.
Littérature
Hans Brenner, KZ-Zwangsarbeit während der NS-Zeit im Dresdner Raum, in: 4. Kolloquium zur dreibändigen Dresdner Stadtgeschichte 2006 vom 18.März 2000, hrsg. von der Landeshauptstadt Dresden, S. 53 – 62.
Ulrich Fritz
Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.89, 90, 91, 92.
Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 13/06/2015.
DRESDEN – Universelle
L’usine de construction mécanique J.G.Müller & Co créée en 1898 était l’une des entreprises traditionnelles de Dresde dans l’industrie du tabac et produisait des machines à fabriquer des cigarettes. Durant la guerre l’Universelle devint, tout comme bien d’autres entreprises de l’industrie du tabac, une usine d’armement qui montait entre autres des projecteurs, des pièces de moteurs d’avions et de torpilleurs, mais aussi des appareils directionnels et des radios radiogoniomètres, dont les pièces détachées arrivaient d’entreprises spécialisées. L’entreprise exécutait entre autres de grosses commandes pour les usines Junkers. C’est pourquoi beaucoup de travailleurs étrangers furent employés sur les lieux de production ; il y eut le jusqu’à 3000 hommes dans les différents camps de travail obligatoire, et surtout à Dresde (1).
Le 9 octobre 1944, Zeiss Ikon s’installa dans le camp extérieur, 14 Florastrasse dans la vieille ville de Dresde, ainsi que dans celui de l’usine Goehle. C’est là qu’arrivèrent les premières femmes déportées en provenance du camp de concentration de Ravensbrück. L’ensemble des bâtiments se composait à l’origine de deux entrepôts de tabac brut et de différentes annexes construits entre 1883 et 1904 par la SA Jasmatzi et loués par l’Universelle spécialement pour la production d’armement.
Le 9 octobre 1944, 500 femmes furent transférées de Ravensbrück au Kommando de l’Universelle. En plus des nombreuses détenues allemandes « asociales », des lettones, des russes, des serbes et des tchèques. Un autre convoi de 200 femmes arriva de Ravensbrück le 19 janvier 1945 à Dresde, parmi elles beaucoup de détenues politiques et des « tziganes ». Quelques transferts arrivèrent de Neurohlau à Dresde ; des renvois de une à cinq femmes dans le camp d’origine Flossenbürg eurent lieu en décembre 1944 et en Janvier et Février 1945. Pour les détenues retransférées, il s’agissait d’une part « d’asociales » allemandes et de « détenues protégées » qui furent remises en liberté ou obtinrent un congé et d’autre part de deux femmes russes qui furent déplacées à Flossenbürg en vue d’un « traitement d’exception », c’est-à-dire pour être exécutées (2).
Les femmes devaient, par équipes, construire ou contrôler des régulateurs pour moteurs d’avions (3). Les exigences de la Kommandantur de Flossenbürg expliquent l’ampleur de la mobilisation (pratiquement constante) du travail obligatoire. Le 9 octobre 1944, premier jour de travail, furent enregistrées 485 ouvrières, les chiffres oscillèrent jusqu’à la fin de l’année entre eux 462 et 492 femmes. Toutes les détenues devaient travailler du lundi au samedi ; le dimanche de 15 à 45 d’entre étaient obligées de travailler (4).
Le bureau central de Ludwigsburg a fourni des appréciations très variées sur l’hébergement, la façon d’être traitées par les gardes SS et le personnel civil, ainsi que sur la nourriture. La plupart des femmes interrogées étaient des détenues allemandes ou autrichiennes, pour qui la nourriture était insuffisante mais le reste en général supportable. Des « tziganes » allemandes et des femmes témoins de Jéhovah estiment que le camp extérieur de l’Universelle de Dresde était mieux que d’autres lieux de souffrances. La plupart des femmes étaient logées dans un bâtiment de l’usine de la Florastrasse dans les deux étages supérieurs et devaient travailler dans la cave et au rez-de-chaussée. Une partie des femmes logeaient dans un baraquement situé sur le terrain de l’usine, elles travaillaient – tout comme celles logées dans l’usine – dans un atelier dans la Zwickauerstrasse (5). La plupart des déclarations parle de mauvais traitements et de punitions infligés par les gardiennes SS, mais jamais d’homicides de détenues par le personnel de garde.
Des SS de Flossenbürg furent détachés à Dresde pour surveiller le camp extérieur qui n’était pas protégé par une clôture. D’après les déclarations de l’ancienne surveillante Margot M. des travailleuses de l’Universelle durent prendre part à la formation de « chef de groupe de travail » ; la formation de quatre semaines eut lieu en août 1944 dans le camp extérieur de Holleischen. Parmi les gardiennes en chef en activité au Kommando de l’Universelle sévissait Charlotte Hanakam, décrite comme brutale, et à partir de fin novembre 1944 Ida Guhl, qui avait exercé auparavant aux Kommando de Dresde-Reick. Charlotte Hanakam et Margot Mehnert furent condamnées en Février 1946 par la cour d’assises de Dresde à cinq ans et quatre mois de réclusion (6). L’enquête révéla que le SS chef de groupe,
Erich Gerhard von Berg, accusé par le bureau central de l’administration judiciaire du Land à Ludwigsburg était chef du Kommando du camp extérieur de Dresde (Bernsdorf) et qu’il devait, d’après ses propres déclarations, contrôler le ravitaillement des détenues et faire les comptes avec les entreprises y compris pour les autres Kommandos de Dresde. C’est ainsi qu’il signa une plainte contre une gardienne en tant que chef de Kommando du camp extérieur de Dresde (l’Universelle)
C’est également de façon concordante que les femmes parlent des bombardements qui détruisirent presque entièrement l’usine et les bunkers de la Florastrasse lors d’une grande attaque aérienne sur Dresde le 14 février 1945 et tuèrent la plupart des femmes. D’après des témoignages, les survivantes étaient entre 9 et 150. On ne peut pas donner de chiffres plus précis des victimes ; dans les livres de matricules de Flossenbürg aucune des femmes n’est mentionnée décédée durant la période en question, ce qui ne correspond pas avec certitude la réalité. Une classification propre aux firmes des membres adhérents du 26 mars 1945 fait état pour ce jour de 685 détenues qui, à la même date, sont déclarées « libérées ». Ces données reflètent, tout comme les 679 femmes indiquées dans le dernier état des forces du 13 avril 1945 plutôt une liquidation progressive du camp dans l’optique des entreprises et de la Kommandantur que la réalité.
D’après un témoignage, le chaos qui suivit l’attaque aérienne permit non pas à peu de détenues mais à 150 de prendre la fuite (7).
Quatre femmes furent reprises et transférées au camp extérieur de Freiberg, mais elles purent tromper un vigile et s’enfuir. L’ancienne détenue Elise D. raconta que, profitant de la confusion générale, elle avait pu fuir avec cinq autres femmes allemandes, parce que des camions arrivés tout exprès devaient regrouper des travailleurs étrangers, mais seulement russes et polonais. Elles se présentèrent au commissariat de police à Ottendorf et des SS les conduisirent au camp de Radeberg. C’est là qu’elles furent libérées en mars 1945 (8). Après l’attaque aérienne, quelques femmes trouvèrent refuge d’abord dans la banlieue de Dresde chez des ouvrières qui les nourrirent et leur donnèrent des vêtements (9). Plusieurs femmes furent blessées au cours de l’attaque et furent prises en charge plus tard par les hôpitaux de Dresde et des environs. Malgré des dégâts matériels considérables, les femmes qui se trouvaient dans la Zwickauerstrasse lors de l’attaque, restèrent indemnes dans l’abri anti aérien. Moins de 100 – 63 d’après une déclaration – 84 d’après d’autres informations – furent conduites par la vallée de L’Elbe vers le sud au camp extérieur de Mockethal – Zatzschke (10).
Il semblerait que quelques femmes y furent abattues. Quelques semaines plus tard, la gardienne SS voulut envoyer les femmes à Pirna ; la marche fut cependant mitraillée
L’usine de fabrication de machines, l’Universelle, continua après la guerre sous le nom de VEB Tabakuni, mais le bâtiment du 14 Florastrasse n’existe plus. Le parquet de Würzburg cessa ses enquêtes en juin 1978.
1 VEB Tabakuni Dresden, Betriebschronik-Faktenmaterial,S.1, in : Sächs.HStA Dresden, 11683, Universelle – Werke J.C. Müller & Co. Dresden,Nr.35.
2 Rücküberstellungen von Aussenlagern nach Flossenbürg, in : CEGESOMA, Mikrofilm14368
3 Ausage Josefa A;,29.6.1967, in : BArch Ludwigsburg, ZStl.IV 410 AR-Z 101/76.
4 Monatliche Forderungsnachweise der Kommandantur Flossenbürg Abt.( Arbeitseinsatz) an die Universelle Maschinenfafrik J.G. Müller & Co., Dresden für Oktober bis Dezember 1944, in : BArch Berlin, 4/Fl 393, Bd.2.
5 Einstellungsbescheid der Staatsanwaltschaft Würzburg vom 15.6.1968, in : BArch Ludwigsburg, ZStl.IV 410AR-Z 101/76.
6 Mitteilung se Generalstaatsanwalts im Lande Sachsen an den Betriebsrat der Universelle, 25.2.1947, in Sächs.HStA Dresden, 11683, Universelle – Werke J.C. Müller & Co. Dresden,Nr.35.
7 Aussage von Cecilia L., 9.10.1970 in : BArch Ludwigsburg, ZStl.IV 410 AR-Z 101/76.
8 Aussage Elise D., 28.10.1976, in : ebenda.
9 Kopie einer entsprechenden handschriftlichen, undatierten Erklärung von Marianne L., « Angestellte im KZ – Lager Florastr. », in : enbenda.
10 Aussage Frieda B., 5.2 .1970, in : ebenda.
Littérature
Rita Sprengel, Der rote Faden, Lebenserinnerungen, Ostpreussen, Weimarer Republik, Ravensbrück, DDR, Die Wende, Berlin 1994.
Hans Brenner, KZ-Zwangsarbeit während der NS-Zeit im Dresdner Raum, in : 4. Kolloquium zur dreibändigen Dresdner Stadtgeschichte 2006 vom 18.März 2000, hrsg. von der Landeshauptstadt Dresden, S.53-62
Ulrich Fritz
Extrait de l’ouvrage de Wolfgang Benz et Barbara Distel « Der Ort des Terrors » p.92, 93, 94,95
Traduit de l’allemand par Nadine Goujon le 06 décembre 2012.
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